5 617 minutes [solo]

11Janvier
2021

15h01.

J’ai entendu un bruit derrière la porte d’entrée. J’ai cru que c’était elle qui revenait mais il n’y avait personne. Suis-je en train d’halluciner des sons ? A des moments, j’ai l’impression d’être dans le réel et à d’autre, je me sens dans une bulle hors du monde. Je n’arrive pas à dormir et pourtant j’ai l’impression de ne pas être réveillée. Je n’ai pas faim. Je n’ai pas soif. Je n’ai pas froid mais je n’ai pas chaud non plus. Tout ce que j’arrive à sentir est le vide dans mon cœur.

Je repense à ce poème de Lamartine. L’isolement. Sa façon de dépeindre le temps qui passe, la vie qui passe et qui continue sans lui. Sa façon de regarder la terre, les feuilles, les collines et valons. La mer et le soleil. Les étoiles par dessus les chaumières. Les tableaux du monde si beaux et pourtant si vains à ses yeux. Rien n’a d’importance. Plus rien n’a de charme. Tout semble vide. Un seul espoir, partir. Quitter la terre comme les orageux aquilons emportent les feuilles flétries.

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. »

La première fois que je l’ai lu, je ressentais la peine de l’auteur sans pour autant la comprendre. Maintenant, j’ai l’impression d’être assise à côté de lui, à l’ombre du vieux chêne, sur la montagne. Le soleil et les larges plaines face à moi, contemplant les tableaux changeants, qui se déroulent à mes pieds.

J’en fais trop… La façon dont je décris ce que je ressens… J’ai l’impression d’en faire un drame insurmontable. J’ai l’impression de parler comme une adolescente puérile et ravagée par ses sentiments. Quand je me relis, je crois entendre Melody et ça m’insupporte. Je m’insupporte.
Pourtant, sur certains points elle a raison. Je joue avec les sentiments des autres seulement parce que je suis égoïste. Et après je pleure ma peine, mes doutes et mes blessures sur une feuille de papier.

Quelle ironie…  

11Janvier
2021

18h46.

Parfois j’ai l’impression que chacun de mes pas me font reculer. Parfois j’ai l’impression de construire des choses et de les voir s’effondrer à cause d’un simple coup de vent. Parfois j’ai l’impression qu’après la pluie vient le beau temps mais qu’au final, les rayons de soleil brûlent plus qu’ils ne réconfortent.
Parfois je me sens bien. Parfois j’ai l’impression que tout me fait mal. Ma tête. Mes émotions. Mon cœur. Mais parfois, tout ce mal est si intense qu’il finit par disparaître.
Parfois…

Je ne sais pas.

J’ai envie d’être un peu seule pourtant l’appartement est déjà vide… Il y a trop de choses dans mon esprit. Trop de chaos. Trop de pensées désorganisées. Monsieur Stevens m’a conseillé d’extérioriser mais je n’arrive pas à savoir comment.  
Je ne sais pas quoi écrire et en même temps il y a trop de choses que je veux mettre sur papier.

J’aimerai juste… J’aimerai juste que tout ceci ne soit qu’un rêve. J’aimerai juste ouvrir les yeux et me réveiller dans le lit, voir sa chevelure blonde et son visage encore endormi. J’aimerai juste pouvoir revenir en arrière, effacer les pages tristes de ma vie. Ou les arracher pour ne plus les voir. Je ne sais pas si je suis triste, frustrée, ou en colère. C’est injuste. Pourquoi ça tombe sur elle ? Pourquoi ça tombe sur moi ? Je sais que je suis égoïste mais je voudrais seulement vivre une vie normale, être épargnée de tous ces événements qui n’ont pas lieu d’être. Si je pouvais tout reconstruire, réécrire des nouveaux chapitres plus joyeux, je le ferai. Je ferai tout ce qu’il faut. J’ai envie de me battre. J’ai besoin de me battre pour continuer à aller mieux. Mais parfois… Parfois je veux seulement poser le stylo et ne plus y toucher parce que j’ai peur de ne pas être capable de rédiger un fin heureuse. J’ai peur de faire des fautes, d’emmêler les phrases et me tromper de mots. J’ai peur de ne pas être capable d’arranger les choses. J’ai peur d’empirer le récit déjà existant.

J’en ai assez ! J’en peux plus, je suis fatiguée ! Je veux juste la retrouver ! Je veux juste être avec elle !

S’il vous plaît.
S’il vous plaît.
S’il vous plaît.
S’il vous plaît.

S’il vous plaît…

Je ne sais pas quoi faire…

11Janvier
2021

23h23.

J’ai peur de la revoir. J’ai peur de croiser sa route.
J’ai envie de la chercher mais je n’ose pas sortir. Je n’ose pas passer la porte. Je n’ose pas sillonner les rues. J’ai fermé la porte de la chambre à clé. J’ai fermé les rideaux.
J’ai trop peur de la revoir.

Je ne veux pas la combattre… Je ne veux pas qu’elle me fasse de mal. Je ne veux pas qu’elle me blesse. Et moi, je serai incapable de lever la main sur elle.
Je sais qu’il faut que je brise cet objet. Je sais qu’il faut que je la retrouve pour honorer ma promesse. Mais l’idée même d’être face à elle me fait trembler. Je n’y arriverai pas… Je n’aurai pas la force…  J’ai trop peur de voir la haine dans ses yeux.

Pardon…