Omae wa mou shindeiru...

La destinée, elle est comme une terre de désolation de laquelle tu ne peux t'échapper
Un fardeau que tu ne peux pas porter, car la charge est trop lourde.

» Je peux en donner pour 100 kobans...
» Seulement 100 ? Attendez ce n'est pas un marché honnête, le prix est censé être bien plus élevé pour une rareté pareille...
» 100 et c'est mon dernier prix, de toute façon vous ne cracherez pas sur cet argent vous qui êtes si pauvre Saito !

Au jour de mon enfance, au dernier soleil couchant, à l'aube de mes 8 ans, mon père Sarutobi Saito a vendue sa seule et unique fille à un tenancier d'okiya pour quelques piécettes, car la vie à Kyoto est un combat, et qu'il ne pouvait être mené davantage par un malhonnête qui passait son temps à perdre aux jeux d'argent. Ce jour là, je devins une adulte qui devait comprendre que le monde fait fi de tout sentiments. Se battre uniquement pour survivre. C'est dans les larmes, alors que je perdais ce qu'une fille avait de plus précieux, que je compris qu'il ne fallait compter sur personne.

Vivre par soi-même

Finalement laissée par le shogun, alors qu'il avait vidé ses bourses de kobans et d'autre chose, je regagnais ce qui devait être ma chambre, prête à devenir un individu que je n'ai jamais rêvé d'être, car le destin en a décidé ainsi.

2 ans passèrent, comme chaque pétales de cerisiers tombant d'un arbre dénaturé.

Quel jour sommes nous ? Je l'ignorais, je n'en savais rien, mais je restais dans un silence immuable, comme si j'avais perdu ma langue, alors que mon patron celui qui me permettait de rester ici et de ne pas être à la rue, m'envoyait en mission pour amuser la galerie de bons clients. Un faible rictus se dessina sur mes lèvres, le rictus du désespoir de quelqu'un qui voulait juste disparaître. Je me rendis à cette ochaya où ils attendaient sagement de se faire divertir, rangée dans mon kimono de soie, mes lèvres peignées avec le rouge de la tentation. J'attirais les regards des plus affamés. Après tout, une enfant de 10 ans, la découverte de l'inconnu est toujours bien plus attirant. Et dans l'époque d'Edo, on fait fi des règles de bienséance. Sans compter qu'une fille avec des yeux bleus aussi délicieux que l'océan, ça n'existe pas partout.

Servant le thé à chacun, alors qu'ils se permettaient quelques attouchements peu distinctifs, je pris place à côté de l'un d'eux, toujours aussi muette qu'une carpe koï. L'un de ses vautours tenta de me séduire par de la conversation bonne enfant. Il me fit l'éloge de son statut de daimyo, en m'expliquant ce que c'était, le pouvoir qu'il avait et me montra ses quatre katanas, des lames uniques fait dans l'acier le plus pur qui soit. Je ne saurais l'expliquer pourquoi...ma fascination pour elles devint grande...bien trop jusqu'à ressentir la cupidité. C'est quand alors il me demanda de le suivre que je redescendis sur terre. Terrés dans une chambre, il vint tout de suite faire preuve d'un peu moins de courtoisie, voulant me violer à son tour. J'aurais pu me laisser faire, comme toujours, faire mon travail pour ne pas m'attirer les coups de fouet de mon tenancier...mais je ne supportais plus de devoir vivre comme une poupée de porcelaine. Je saisis donc l'un de ses katanas dont il a attiré mon regard, et le saigna comme un porcelet, l'égorgeant avant qu'il ne puisse crier sa dernière volonté.

Reprenant les vêtements qu'il m'avait arraché, je saisissais les armes dans leur fourreaux pour les attacher à ma ceinture et prit la fuite de l'ochaya. Alors qu'une pluie torrentielle s'abattait sur Kyoto, une silhouette marchait dans la pénombre de la nuit, le regard empli de haine, la rage était telle que rien ne pourrait arrêter ce qui allait se produire. Je regagnais l'okiya alors que des cris de plaisir formait une symphonie.

» Ha Leik.....ou as-tu trouvé ses armes ?

Aucune réponse ne vint, simplement un étranglement, puis de nouveau la mélopée des gémissements. Cette nuit là, vint l'irréparable, m'obligeant à prendre une vie de renégate jusqu'à mon dernier souffle. Que vengeance s'accomplisse disais-je alors que maladroitement je tuais tout ce qui se trouvait sur mon passage. J'ignorais d'où me venait ce courage, cette expertise mais je souhaitais me libérer de mes chaines et c'est tout ce qui importait. Une fois que les gémissements de plaisirs se turent, je récupérais du peu de mes affaires et vint à monter dans la dernière pièce où celui qui m'avait rendue ainsi allait payer sa dette.  

» Oui je compte la tuer, elle me coute beaucoup trop chère...

C'est toi qui va mourir...
....
Une lutte s'en suivit mais au bout du compte, le voir baigner dans son propre sang, fut mon entière satisfaction. Je regardais ce corps gisant, le regard éteint d'âme, alors que les fleurs de cerisiers qui faisaient barrettes dans mes cheveux tombaient pour venir y tremper leur pétales dans le flux de vie.

Aujourd'hui mon calvaire prend fin...

• • •

« Connais-tu la légende de Hanashuiro ? Le plus célèbre assassin de tout le Kansai ? »
« De tout ce que j'en ai entendu, il s'agirait d'un homme possédant quatre katanas qui n'a aucune pitié et dont la spécialité est de couper de façon net, la tête de ses cibles avant d'y laisser des fleurs de cerisiers rouges sur les corps morts... »
« C'est cela oui, et ce qui est flippant c'est qu'on a jamais retrouvé les têtes qui ont été séparées de leur corps, comme si Hanashuiro les gardait comme un trophée...»

« T'en fait pas un jour cet assassin se fera prendre...Il y a toujours une justice en ce bas-monde »

Une justice hein ?

Hanashuiro...oui c'est un nom qui me plait bien ! Le peuple effrayé me nommait ainsi ? Peut être est-ce que ça les rassurait de poser un nom sur un inconnu qui sème le chaos ? La seule différence avec les assassins de cette époque, c'est que je ne tue que ce qui est une prime. Car après tout il faut bien gagner sa vie. N'ais-je pas dit plus tôt qu'il faut apprendre à vivre par soi-même? Et puis....j'avais pris goût au sang, à voir les malhonnêtes s'éteindre dans un dernier souffle. La justice, c'était moi et personne d'autre, car la criminalité avait baissé d'un niveau depuis mon apparition.

Malheureusement, mon apogée ne durera pas éternellement car une grande guerre éclata, rasant tout sur son passage, Kyoto étant le dernier rempart à franchir. Le shogunat était bien trop occupé à se cacher dans ses quartiers et ne voyait pas le monde souffrir de la pauvreté, la famine, et la mort...Tout ce que j'avais à faire, c'était de m'enfuir d'ici non ? Mais pour aller où ? tandis que j'estompais ma flemme dans un sake bien mérité, quelqu'un s'assit devant moi à ma table. Je haussais le regard, les yeux d'une fille de 14 ans, d'un âge trop prématuré pour ce qu'elle était.

» Je ne pense pas t'avoir invité à boire avec moi...? Alors dégage....
» Connais-tu la légende de la sorcière des dimensions ?

De quoi me parlait-il ? Qu'est-ce que c'était que cette histoire à dormir debout ?

» Je ne crois pas aux légendes, elles ne sont que fables et mensonges.
» C'est exactement ce que j'ai dis quand on m'a posé la question Hanashuiro...jusqu'à trouver cette "fable" de moi même...
» ....Comment tu...
» N'es-tu toi même pas une légende que le peuple a créé par crainte, par dépit ? Ce soir, tes ennemis vont disparaître, et c'est pour cela qu'elle m'a envoyée ici, qu'elle m'a envoyée venir te chercher...car toi, tu es un être à part, tu ne mérites pas de mourir dans le feu et la cendre... Suis-moi et tu seras sauvée.

Qu'est-ce que j'avais à perdre après tout ?
Plus rien....

J'ai suivi cet homme, me promettant qu'à la moindre trahison, je l'enverrais six pieds sous terres par les fonds. Et il avait dit la vérité. Une femme aux allures macabres, récitait des incantations sacrées, terrée dans une forêt sombre et reculée.

» Hanashuiro...ton voyage t'attend...
» Mon voyage ?
» En compensation, je ne te demanderais qu'une seule chose : Le bijou que ta mère t'a donné enfant...
» Hmpf c'est cher payé pour quelqu'un qui dit me sauver la vie...
» Ne t'en fait pas...tu perdras bien plus que tu ne l'imagines quand tu traverseras le portail...

Si j'avais fait attention à ses paroles autrefois.

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Arrivée devant ce qui semble être une énorme bâtisse, bien loin du style nippon que j'avais connu jusqu'à maintenant, j'essayais de comprendre pourquoi cette sorcière m'avait envoyé ici...en plus je n'avais rien perdu contrairement à ce qu'elle me disait...Il n'y avait personne aux alentours. Bon autant rentrer et aller voir non ?

Un pas...
Rien qu'un seul pas...
Te fait dire adieu à ton existence...

Tandis que je vins à passer les portes, je sentis mon coeur se mettre à battre plus intensément jusqu'à brûler dans ma poitrine, mes jambes cédèrent sous mon poids, et j'avais l'impression que j'allais mourir. Non je me sentais même déjà inexistante. Mon souffle devint saccadé abruptement, ma respiration presque absente, et je hurlais à la mort alors que je sentais ma bouche me faire un mal permissif ! Sortis de leur orbites, mes yeux cherchaient une aide vagabonde...

Ai...dez m...oi....
P...ar p...it...ié...

Mes canines se mirent à s'aiguiser comme des lames de rasoir, à pousser et me tordre de douleur, me faisant cracher du sang...Mon ouïe perça chaque mots, chaque phrases prononcées autour de moi comme un écho assourdissant. N'y pouvant plus, n'ayant plus la force de résister, je prenais ma tête entre mes mains, roulée en boule sur le côté comme un animal. J'avais le goût âpre des cendres dans la bouche, et une soif insatiable...Vite de l'eau quelque chose !

» Mademoiselle, est-ce que tout va bien ? vous voulez que j'aille chercher l'infirmière ?

Je regardais la personne qui s'accroupit face à moi, et quelque chose me percuta, me glaça le sang. Ma vision avait changée, je ne saurais dire comment et pourquoi, mais je voyais les veines sanguines de cet inconnu, j'entendais son coeur battre à rythme progressif. Et le mien allait finir par me lâcher si ça continuait ainsi. Terrifiée, j'hurlais encore une fois à la mort, en suppliant qu'on me laisse tranquille avant de me laisser emportée par mes tourments.

Un cauchemar...
C'était juste un cauchemar pas vrai ?

Quand je me suis réveillée, j'étais auprès d'une femme qui me disait que tout allait bien. Mais je ne pouvais la croire. J'avais perdu quelque chose. Je me sentais différente et comme morte. Regardant mes mains tremblantes, j'y voyais chaque vaisseaux et j'entendais l’hémoglobine couler à flots comme le refrain d'un sonate apocalyptique.

Je n'étais plus humaine...  

• • •

Le temps, est une chose sur laquelle je n'aurais jamais prise. Cela faisait maintenant quatre ans que j'étais arrivée à Sin'dare, quatre ans que ma vie, mon état d'esprit avait changé en arpentant les murs de cette enceinte...quatre ans que j'étais devenue une vampire, un être assoiffé qui se repait du sang qu'il trouve...Quatre ans que j'avais appris à développer mes pouvoirs. Tout me semblait normal, ma terre natale ne me manquait pas, et je vivais ma vie étudiante comme si rien ne pouvait la remplacer.

Souffrant silencieusement d'un mal que je peine à contrôler...