| Sin Theatre |
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Le seul que vos peurs rendent plus fort, c'est moi | Elijah DesamesS |:| Licence 1 Elijah Desames Elijah Desames
Sexe : Identité de genre : Apparitions : 225
Inscription le : 19/04/2019
Né(e) le : 12/03/2003
Age : 21
Taille / Poids : 1m60 / 48kg
Nationalité : Française
Situation amoureuse : Non, on n'est pas ENSEMBLE !
Couleur(s) de parole : #A4CD27
| Ven 19 Avr - 2:12 | | |
Elijah Desames | Surnom : Eli Âge : 16 ans Date de naissance : 12 mars 2003
Lieu de naissance : Caen, en France Nationalité : Française Orientation sexuelle : Il y a d'autres soucis plus importants
Race : Croque-mitaine Pouvoir : Spires Race de naissance : Humain
Classification : Blue Bird Raison : Spécialisé en électronique Année scolaire : Deuxième année Date d'arrivée à S'indarë : 16 avril 2019 Statut : Interne
| PhysiqueYeux : Verts Cheveux : Marrons Taille : 1m54. Mais il a à peine commencé à grandir Poids : 40kg Vêtements et/ou style : Vêtements larges Tatouages/piercings ? Ni l'un ni l'autre Signe distinctif : Il rougit beaucoup Caractéristiques raciales : Quand il se transforme, il devient une ombre de fumée à quatre bras, lévitant au-dessus du sol Autre chose ? : Elijah est né avec un corps de femme. Et plus il grandit, plus il le déteste.
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Caractère *clac* - Est-ce que tu peux arrêter de faire ça ? - Si j'arrête, il y aura plus de sang. *clac* *clac* Un élastique qui claque sur la peau d'un poignet. C'est le son qui le précède souvent, le son qu'on entend quand il est dans les parages. Technique de base pour éloigner les envies de mutilation qui ont grandi dans son cœur pendant toute son adolescence. Une technique conseillée par son psy, et à laquelle il obéit sans sourciller. Parce que dans le fond, il ne veut pas mourir. Il veut juste vivre tel qu'il est.
Elijah est un garçon abordable. À vrai dire, il semble incapable de méchanceté ou de cruauté, porté par une gentillesse au fond de son cœur que même les pires souffrances de sa vie n'ont pas eu la force d'effacer. Il n'a détesté qu'une personne dans son existence, il la déteste encore, et il est certain de ne jamais mépriser personne d'autre autant qu'elle. Non, Elijah ne vous insultera pas. Il ne vous criera pas dessus et il vous appréciera, dans le fond. Au mieux il vous ignorera ; il n'aime pas spécialement la haine, c'est un sentiment épuisant. Pas rancunier pour un sou, il est du genre à pardonner très vite et à oublier plus vite encore ou, en tout cas, il n'en retiendra pas de haine. De la souffrance, peut-être, parfois une profonde amertume. Non, en dehors de cette file qui l'a fait souffrir plus que de raison, la seule personne qu'il semble détester, c'est lui-même.
Elijah maudit sa maladresse, physique comme mentale. Il n'est pas spécialement adroit, il lui arrive souvent de lâcher des choses ou de trébucher sur rien, une petite aspérité du sol, mais ça passe encore tant qu'il ne bouscule personne. Non, la part de sa maladresse qu'il a le plus de mal à supporter, c'est celle qu'il a envers les autres. L'empathie qui rythme son quotidien, son besoin intrinsèque de prendre soin des autres, de les aider et de les protéger, se heurte à une tendance presque machiavélique à l'erreur. Souvent, quand il cherche à aider quelqu'un, il en arrive à faire plus de mal que de bien. Il ne sait pas comment s'y prendre, pour résoudre les problèmes. Mais il ne supporte pas plus de voir les gens souffrir.
C'est une personne presque trop douce et sensible pour ce monde. Les émotions des autres s'imprègnent en lui comme s'il était une éponge et, s'il sourit devant le bonheur des autres, il sent son cœur se briser dès qu'il voit quelqu'un s'effondrer. Alors il évite, autant que possible, de blesser les gens autour de lui. Il aura toujours une parole gentille, un mot pour essayer de vous redonner le sourire si vous n'allez pas bien, un compliment pour que vous ne doutiez jamais de votre valeur. Cette gentillesse naturelle a juste eu tendance à le priver de toute répartie, et il a un mal fou à trouver réponse aux provocations et remarques. Il se contente souvent de sourire doucement, et de souffrir en silence si vous l'avez blessé. Et s'il craque, un jour, ce sera simplement par espoir que l'autre ait un cœur et qu'il comprendra et regrettera ses actes. Pas une once de vengeance ne coule dans ses veines, il a l'espoir que tout le monde peut se racheter et réparer ses torts. Sans doute parce qu'il en fait beaucoup par erreur, de son côté, et que l'idée d'être impardonnable lui nouerait trop les entrailles.
En dehors du bien-être des autres, Elijah est poussé en avant par le désir profond de s'intégrer, de se faire enfin des amis qui l'apprécieront autant que ceux qu'il avait au collège. Il force un peu sur son caractère, parfois, tentant d'atteindre une virilité stéréotypée que sa gentillesse naturelle l'empêche d'avoir la plupart du temps. Mais comme il sait qu'il ne saura jamais s'intégrer comme "mâle alpha", comme dit son grand frère, en étant le gars fort, grand et musclé de la bande, il a décidé d'adopter l'autre rôle, celui qui fait des blagues pas forcément drôles, qui tombent tout de même rarement à plat. Il est le clown du groupe, celui qui trouvera toujours un jeu de mot ou une remarque pour faire rire son entourage. C'est sur ça qu'il a construit sa confiance en lui et, même s'il doit la remonter pièce par pièce actuellement, c'est une forme d'amour-propre qu'il se sent capable de retrouver et de cultiver toute sa vie.
Il a un certain nombre de passions. Adepte de football, surtout, et un peu de basket, il reste en priorité un maniaque de l'électronique et du bricolage. Avec le bon matériel et un peu d'inspiration, il peut bidouiller tout et n'importe quoi, créer des machines plus sophistiquées qu'elle n'y paraisse. Étrangement minutieux malgré sa maladresse habituelle, il perd vite conscience du monde réel quand il a des engrenages, des circuits imprimés et des outils entre les mains. Il vous entendra et vous écoutera quand même, mais il est difficile de lui tirer une réponse ou une réaction. Il apprécie le dessin, aussi mauvais soit-il dans le domaine, écoute beaucoup de musique et danse à ses heures perdues, quand personne n'est là pour le regarder.
Trop timide pour chanter, danser ou même affirmer ses positions en public, Elijah est aussi mal à l'aise quand il fait face à une grande foule, seul centre de l'attention, et qu'il n'est pas en train de lancer une plaisanterie en l'air. Son seuil de confort se situe à la quinzaine de personne, coup de chance vu la taille des classes de sa nouvelle école. Sa timidité, en plus de l'expression devant un trop grand public, s'applique aussi à tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la séduction. Il ne sait pas draguer et ne saura sans doute jamais le faire, et il est mal à l'aise avec l'intérêt que les autres peuvent lui porter. Au font, il a peur que ce soit pour se moquer de lui, parce qu'il est loin de se trouver séduisant ou attirant. Autant dire qu'il y a peu de chance pour qu'il croit à un compliment, alors même qu'il les distribue comme autant de baumes de réconfort. | RaceLe Croque-mitaine, celui dont on parle aux enfants pour leur faire peur, pour les empêcher d'approcher des endroits dangereux, de se coucher trop tard, de se perdre dans l'obscurité. Une blague incompréhensible pour Elijah, une malédiction. La faim est dévorante. Elle est toujours là, au creux de son ventre. Il a besoin de vos peurs. Son corps se nourrit de terreurs, d'angoisses et de cauchemars et le monstre en lui a toujours faim. Il lui parle, parfois, d'une voix grave et sombre, pour réclamer sa pitance. Le croque-mitaine hante son corps et son esprit, se réveille sous forme d'aura d'ombres autour de lui s'il sent votre peur.
Quand il a faim, son corps devient instable. Le monstre tente de prendre sa place, de prendre le contrôle de ses muscles. L'aura d'ombres qui l'entoure lorsqu'il sent votre peur prend le contrôle. Affamé, Elijah perd sa forme humaine. La fumée noire qui compose son autre forme cherche à le remplacer, en quête de nourriture. Si vous le voyez prostré au sol, secoué de tremblements, de la fumée noire sortant de son dos, remontant sur sa peau, c'est le moment de fuir. Parce que quand il ne contrôle plus sa faim, il devient dangereux.
Pour se nourrir, le croque-mitaine fait ressurgir vos peurs. Celles qui vous hantent de jour comme de nuit, celle qui vous dévorent les entrailles, vos terrifient et vous tétanisent. Il les ressort de votre cœur et de votre subconscient, vous force à les affronter, encore éveillé, piégé face à ce qui vous glace le sang au plus possible. Il les extrapole, les étire à l'extrême au point que vous penserez sûrement mourir l'espace d'un instant. Puis il les absorbe, les extrait de votre corps et de votre esprit, et vous oubliez. Pendant un temps. 24 à 48 heures, c'est le temps pendant lequel Elijah vous débarrassera de vos peurs. Ensuite de cela, elles reviendront, comme avant – pires, s'il mourait vraiment de faim - pour vous hanter à nouveau. Ne faites pas attention à cette mèche blanche dans vos cheveux, vous ne vous rappellerez pourquoi elle est là que dans 24 heures. PouvoirElijah peut arpenter les voies de votre imagination. Son pouvoir lui permet de voir, entendre, de se représenter comme s'il y était toutes les scènes, personnes et choses que vous imaginez.
Ce pouvoir s'active et se désactive sur commande, mais il est très loin de maîtriser cet aspect. Quand il s'infiltre dans votre imagination, les images apparaissent devant lui. Vous vous voyez en train de casser les dents du gars qui vous a fait une remarque désagréable la veille ? Il vous verra apparaître devant lui, en train de vous battre, et assistera à votre victoire écrasante. Vous imaginez la douce chaleur des lèvres d'un de vos camarades dans votre cou ? Il le verra se glisser derrière vous, embrasser délicatement votre nuque. Tout ce que votre esprit peut créer, tout ce que votre cerveau se représente, il le voit apparaître tel des mirages. Et c'est aussi dérangeant que vous le pensez.
Difficile de faire la différence entre les scènes qui sont réelles et celles que vous faites apparaître sous ses yeux ; vous pourrez le voir soudainement sursauter devant quelque chose qui n'est pas là - que ce soit une scène violente, un monstre ou à peu près n'importe quoi de visiblement effrayant ou agressif – ou bien fermer subitement les yeux parce que l'imagination des personnes autour de lui s'est un peu... emballée. De manière générale, les visions peuvent être effacées s'il s'en approche trop, puisqu'il ne peut pas les toucher, et qu'elles se dissipent comme des volutes de fumée dès qu'il passe la main à travers.
Si les humains ne peuvent pas voir ce qui apparaît à ses yeux quand son pouvoir est actif, ce n'est pas le cas des machines : caméras, appareils photos et téléphones capturent les images que Spires lui montre et les enregistrent. Vous ne les verrez pas à travers l'objectif mais, sur l'image finale, fantômes, scènes et illusions se déroulent sur la pellicule, comme s'ils avaient un semblant de réel. |
Histoire"Mon corps n'est pas le mien. Ne me regardez pas comme ça. Je connais le regard que les gens comme vous posent sur moi. C'est le genre de regard de ceux qui n'ont jamais eu ce problème, de ceux dont le plus grand complexe est le petit excès alimentaire qu'ils ont fait la veille et qui a ajouté un kilo sur la balance. Au mieux, vous détestez peut-être la forme de votre nez, le petit double-menton quand vous baissez la tête, le grain de beauté disgracieux sur votre cuisse, la courbe un peu anormale de vos mains. Soyez heureux, au moins il reste des parts de votre corps que vous aimez.
Vous m'avez jugé. Tous autant que vous êtes. Si je quitte votre école, aujourd'hui, c'est parce que votre regard m'a transpercé le cœur. C'est quoi, cette voix de gonzesse ? Tu es un gars trop maigre pour avoir une forme de poitrine. Tu es une fille, tu es bizarre, pourquoi tu ne portes pas une tenue de fille, comme toutes les autres ? Héloïse, c'est ça ? Je suis né dans ce corps qui m'a maudit dès mon premier souffle. Mes grands frères ont eu plus de chance. Pourquoi je suis le seul qui a raté le coche ? Et vous n'avez pas cherché à comprendre, aucun d'entre vous. Dès que vous avez su, dès que vous avez compris, vous avez détruit le peu de vie que j'avais réussi à construire. Alors je vais vous dire ce que vous avez réduit en cendres. Je vais remonter pièce par pièce la structure contre laquelle vous avez lâché votre boulet de canon.
Oui, je m'appelais Héloïse. C'est sous ce nom que je suis venu au monde, deux ans après Julien et un an après David, mes deux frères que vous appréciez beaucoup plus que moi. Au début, ça allait. J'étais un bébé, un enfant innocent qui ne réalisait pas encore la différence qu'on allait m'imposer. Je jouais avec mes frères, que ce soit des jeux "de fille" ou "de garçon". Oui, j'ai joué à la poupée, comme Julien, et j'ai aussi joué aux petites voitures comme David. On a tout partagé, nos jouets et nos histoires, pendant qu'on était encore "pareils". Et puis les choses ont commencé à me sembler bizarres.
Pourquoi je devais porter des robes aux fêtes de famille, et pas eux ? Pourquoi ma mère semblait me privilégier, parfois ? Pourquoi accordait-elle autant d'importance à mon apparence ? Pourquoi l'école ne partait pas du principe que j'allais vouloir jouer au foot et au basket, comme mes frères avant moi, et cherchait à m'inscrire d'office dans des activités d'intérieur ? Oh, vous allez penser comme mes parents. Ce n'est rien, elle est juste un peu masculine, c'est un garçon manqué. Ce terme est tellement vrai, et tellement douloureux en même temps. Oui, quelque chose a raté. Et c'est ce petit quelque chose qui a raté qui me compresse le cœur de plus en plus à mesure que je grandis.
La sensation n'est pas partie. Je ne comprenais pas les filles. Non, pire que ça : quand je me regardais dans la glace et que je voyais une fille me rendre mon regard, je n'avais pas l'impression de me regarder. J'avais l'impression de regarder un corps étranger qui essayer de se superposer au mien. Vous avez déjà vu Men In Black ? Eh bien j'avais l'impression d'être cet alien qui utilise le corps d'un humain comme vêtement. J'avais neuf ans. C'était avant que je connaisse un seul d'entre vous. Sauf peut-être toi, Camille. Peut-être que c'est pour ça que c'est toi qui m'a le plus blessé. Quand j'avais dix ans, j'ai juste prétendu que je ne voulais plus porter de jupes et de robes. J'ai inventé quelque chose, j'ai dit que c'était pas confortable, et ça a suffi pour que je puisse porter des vêtements qui correspondaient un peu plus à celui que j'étais, au fond. Même s'ils restaient trop... trop féminins. Il y avait moins d'étrangeté dans mon image.
Mais vous savez ce que c'est. Vous l'avez toutes et tous vécu, après tout. On est tous des adolescents, maintenant. Oui, vous savez, ce moment où on cesse d'être "tous pareils". Où les voix des garçons commencent à changer, et où mon corps a décidé de se mettre à changer aussi. Camille, tu étais surexcitée. Tu commençais à avoir de la poitrine, très peu parce qu'on était encore jeunes, mais assez. Tu as commencé à porter des soutiens-gorges et tu en jubilais presque, alors que tu empruntais le maquillage de ta mère. Et tu t'es éloignée de moi. Moi qui continuait d'aimer le sport, qui continuait de porter des jeans et des t-shirts, qui refusait le moindre contact avec ton fard à paupière et ton eye-liner, qui lorgnait sur des sous-vêtements si différents des tiens... Tu m'as rejetée. Un jour tu grandiras. Tu comprendras. Mais je n'ai pas envie de traîner avec une gamine.
Qu'est-ce qui a fait le plus mal ? Une ? Gamine ? Le fait que tu me laisses derrière parce que je n'étais pas assez fille pour toi ? À onze ans, je t'avais perdue, toi la seule amie que j'avais. À onze ans, j'ai pris le rasoir de mon frère, celui que je n'utiliserais jamais, et je l'ai passé sur mon bras. Une fois, deux fois, trois fois, jusqu'à ce que le sang commence à couler. Et d'un coup, ça allait mieux. Ce corps qui n'était pas le mien, je ne pouvais pas le retirer, mais je pouvais lui faire payer l'affront qu'il m'avait fait. J'ai repris ma vie. Chaque jour, j'étais Héloïse Desames. Chaque nuit, j'avais plus de sang sur les mains.
Elle était douée en maths. Elle était douée en sport. Elle était juste un peu bizarre, avec ses sweats et ses grand t-shirts, mais elle traînait plus souvent avec les mecs qu'avec les nanas un peu superficielles. Ouais, Hélo, tu es plus un pote qu'une meuf, pour nous. Je n'ai jamais aimé personne dans ma vie plus que ces gars-là. Donc, j'étais assez bon élève. J'étais la seule "fille" d'un groupe de potes. C'était bien. J'arrivais à contrôler le dégoût régulier de chaque douche, de chaque moment où mes vêtements ne cachaient pas mon corps, en augmentant le nombre de marques sur mon bras. Je me suis construit une identité. J'ai noyé ma féminité dans le sang de mes poignets. Mais ça allait. J'allais bien. Personne ne s'était rendu compte que j'étais un mec, personne ne s'était rendu compte que la peau blanche de mes bras ne l'était plus. Mais ça ne pouvait pas durer éternellement.
Pour commencer, il y a eu Quentin. Quentin était amoureux de moi, faisons simple. Quentin pensait que j'étais une fille. Il ne voyait que ça, de moi, que ce que je n'étais pas. Je n'étais plus un pote. J'étais une jolie nana qui traînait avec lui. Sympa, intelligente, qui le comprenait, qui partageait ses passions. Et aussi gentil qu'il soit, ça ne changeait rien à rien. Je ne peux même pas vous dire s'il m'aurait plu ou non : ce n'était pas moi qu'il essayait de séduire. C'était le vêtement en forme de fille que je portais. Mais bon, au moins, il l'a bien pris, peut-être parce que j'ai inventé quelque chose, quelque chose de totalement faux. J'ai dit que je n'étais pas prête à sortir avec un garçon. Tu parles. Je n'avais pas envie d'être la fille avec qui il sortirait. On est restés amis, ça a même été le premier à qui j'ai fini par avouer la vérité. Que j'étais un garçon. Non pas juste un garçon manqué, pas juste une fille un peu masculine, un vrai garçon, quoi qu'en dise mon corps. Il a mis un moment à comprendre. Au début, il pensait que j'étais lesbienne. Après, il a compris que ça n'avait rien à voir.
C'est avec lui que j'ai commencé à accepter un peu plus ce que j'étais. Alors qu'il n'y connaissait rien, qu'il n'y comprenait pas grand chose, il a cherché un peu. Il a même prétendu au psy pour enfants qu'il voyait pour d'autres problèmes que c'était lui qui n'était pas sûr d'être un garçon. Pour grappiller des infos. C'est avec lui que j'ai trouvé le prénom sous lequel vous m'avez rencontré. Elijah. Ça venait d'un de ses livres, ce n'était pas trop éloigné du mien, ça rendait ça plus simple. Devant les gens, il m'appelait El. Quand on était entre potes, il m'appelait Elijah. Avec lui, j'étais enfin moi-même, pleinement, pas juste une fille virile. Ça, c'était quand j'avais treize ans. Mon corps a grandi un peu moins vite que certains autres, mais il a grandi. J'ai commencé à avoir de la poitrine. Et la lame qui s'était éloignée de mes poignets depuis le début de mon amitié avec Quentin a recommencé à me faire de l’œil.
Le miroir se déformait de plus en plus. Ma mère a commencé à me parler de trucs que je n'avais pas envie de connaître. Il faudrait que tu commences à porter des soutiens-gorges, tu risques de bientôt avoir tes règles, pourquoi tu te maquilles pas un peu, il faudrait t'épiler. Trop de mots qui me donnaient la nausée. J'ai regardé ce corps qui refusait de me ressembler, ce début de poitrine qui annonçait des changements trop grands pour moi. La lame a coupé plus profondément, cette fois-là, assez pour que je tombe dans les pommes. Assez pour qu'on me trouve, aussi, qu'on voit toutes les marques que j'avais réussi à cacher pendant deux ans.
J'ai vu un psy. Je lui ai tout raconté, il a tout raconté à mes parents. Mon père était trop choqué que j'aie pu me trancher les veines pour le nier. Très bien, il aurait trois fils, peu importe tant que je restais en vie et que j'arrêtais de tracer des marques sanglantes sur ma peau, non ? Il m'a acheté des vêtements, il a jeté toutes mes anciennes affaires, il a changé le nom sur ma porte ; en fait, il a été pris dans une frénésie presque folle pour effacer tout ce qui était "fille" en moi. Si être un homme te fait du bien, tu seras un homme. Mon père est un héros. Ma mère, un peu moins.
Ma mère est comme vous. Elle ne l'accepte pas. Elle ne le comprend pas et elle n'essaye pas. Une fois sur deux, elle m'appelle Héloïse. Une fois sur deux, elle dit "elle" quand elle parle de moi. Ils se disputent beaucoup à cause de moi. Plusieurs fois, j'ai songé à redevenir Héloïse pour faire cesser leurs disputes. Mais j'ai regardé ce reflet. Ma coiffure, ma tenue, mon apparence indéniablement plus masculine. Je n'avais plus à faire semblant. Je ne pouvais plus faire semblant. Ça a impliqué de changer de collège, parce que les gens de l'ancien m'avaient tous connu comme une fille, et que le psy a expliqué que ça poserait problème. Ça m'a fait mal de ne plus être dans la classe de Quentin, ni dans son école, et de me dire que je devrais me faire des nouveaux amis avec ce nouveau nom et cette nouvelle image, mais on s'est promis de ne pas se perdre de vue.
Mon année de troisième s'est faite dans un nouveau collège où personne ne me connaissait. C'était... difficile, au début. Mais j'ai réussi à m'intégrer. J'ai réussi à me débarrasser de la pulsion de me couper les poignets. J'étais Elijah, enfin et pleinement. Je me suis découvert une passion pour l'électronique, un talent aussi, un domaine qui m'intéressait vraiment. Bidouiller des choses, modifier, réparer des programmes, des machines et ce genre de choses pour qu'ils soient comme ils étaient censés être. J'ai rejoint une petite équipe de foot avec mes nouveaux potes, j'ai aidé un camarade avec ses maths, je me suis fait aider par un autre avec l'anglais. Au final, on est devenu aussi bons l'un que l'autre dans nos matières respectives. Je l'ai regardé sortir avec une, deux, puis trois filles, dans des histoires un peu trop pleines de drama pour que j'aie envie de suivre le même chemin. De toute manière, mon psy me l'a dit très clairement : avant de songer à aimer quelqu'un, il faut commencer par s'aimer soi-même. Je ne peux qu'être d'accord avec lui. Et du coup, grâce à vous tous, j'ai encore plus de pain sur la planche.
J'avais construit quelque chose. Vous voyez, avant que vous arriviez, tous, j'avais des amis, un cursus scolaire assez stable, une vie sociale, une vie de famille globalement acceptable en dehors de ma mère, des cicatrices qui ne se rouvraient pas. J'étais si proche de m'aimer. Si proche de pouvoir aimer quelqu'un d'autre, alors. Mais vous m'avez arraché ça. Je suis entré au lycée. De mes amis de mon ancien collège, un seul est allé dans le même que moi, mais c'était suffisant pour que j'aie une base sur laquelle me reposer dans ce monde inconnu. Lui aussi, d'ailleurs. Petits poissons dans une mare d'étranger, on faisait notre chemin tranquillement.
Qui a commencé ? Toi, Nadia. C'est toi qui a commencé. Parce qu'un jour, tu as posé ta main sur mon torse, après avoir glissé. Tentative de drague ? Peut-être. C'est devenue le point de départ de ma descente aux enfers. Parce que cette poitrine que je compressais du mieux que je pouvais, tu l'as sentie quand même. Et j'ai cessé d'être un mec, à tes yeux, puis aux yeux des autres. Tu l'as dit à tes potes. Le dégoût dans ta voix et dans ton regard à chaque fois que tu étais forcée de m'adresser la parole n'était plus perceptible, il était carrément brûlant. Palpable et plus douloureux encore qu'une lame dans le poignet.
Il s'est passé beaucoup de choses, ensuite. Vous le savez tous, mais peut-être dois-je vous les rappeler ? Il y a eu ton groupe de potes, Jérémie, Dimitri et Fabien. Ils me sont tombés dessus quand j'allais aux toilettes, ils m'ont choppé sous les bras et ils m'ont jeté dehors, humilié, traîné par les bras jusqu'aux toilettes des filles pour me pousser à l'intérieur en rigolant. Mon frère aîné a voulu me défendre, ils ont ri, il a frappé. Mais même le nez en sang du premier des trois n'a pas suffi à calmer la douleur, la honte et la peur qu'ils avaient instillées. Il y a eu toi, Nadia, qui a mis un point d'honneur à me donner un surnom féminin différent tous les jours avec ce sourire moqueur qui ne quittait jamais tes lèvres. Il y a eu la rumeur, grondante, qui a enflé dans toute l'école.
Vous voulez une liste plus longue, peut-être ? Alors toi, Mélanie, qui a aidé à la répandre, toi qui m'a dit le seul jour où tu m'as vraiment adressé la parole que j'étais une fille hideuse et que je ferais mieux de cacher mon visage plutôt que mon corps, toi qui a commencé à répandre des rumeurs bien plus sales et plus vulgaires que la simple vérité sur le corps que je cachais. Toi, Cécile, tu m'as méprisé, mais s'il n'y avait que ça... Non, plutôt que de juste me mépriser, tu as réunis tes amis. Mecs, filles, lycéen ou plus vieux, j'avais l'impression qu'à chaque coin de rue m'attendait un de tes chiens de garde, prêt à s'en prendre à moi. Je ne sais pas ce qui est le pire, entre leurs rires, leurs piques, ou leurs coups. J'ai encore du mal à croire que je m'en suis sorti sans que l'un d'eux ait l'idée de vérifier "de plus près" cette histoire de corps. Je sais qu'ils en auraient été capable. Il y a eu toi, Hugo. Tu étais mon ami, au début, le seul qu'il me restait du collège, mais tu as préféré t'éloigner. Peur que la rumeur te retombe dessus, peut-être, ou peut-être juste que tu ne m'approuvais pas. Je peux au moins te reconnaître que tu n'as pas rejoint les moqueries. Mais en les ignorant, tu n'étais pas mieux que les autres.
Et il y a eu Camille. Tu es, et de loin, la personne que je déteste le plus sur cette planète. La seule, sans doute. Parce que si Nadia a lancé la rumeur, tu es celle qui y a gravé mon nom au fer rouge. Le "eh il y a un mec qui est en fait une fille" est devenu bien plus ciblé. Ciblé sur moi, évidemment. Je ne sais pas ce que je t'ai fait, pour que tu m'en veuilles autant. J'ai dû être odieux, un jour ou un autre, j'ai dû dire quelque chose qui t'a déplu. Ou peut-être que tu es juste une salope. Je ne vois que ça. Qu'est-ce qui, sur cette planète, pourrait justifier ce que tu as fait, sinon ? Je pense que ce cours de sport restera gravé éternellement dans ma mémoire. Je me disais que si je te revoyais un jours, je te ferais la même chose. Tu le vivrais bien ? Dis-moi, vas-y, lève-toi devant tout le monde et dis-le, que tu le vivrais bien. Que tu supporterais sans ciller, sereine et calme, que quelqu'un t'arrache ton haut devant toute la classe. L'accompagne d'un "vous voyez bien, que c'est une fille". Je pense que j'en ai rêvé. De toi, les seins à l'air devant tout le monde, en train d'essayer de cacher cette poitrine dont tu étais si fière et de contenir cette masse de graisse informe entre tes bras pour que personne ne la voie. Mais c'était pire que ça, pour moi. C'était retourner le couteau dans la plaie jusqu'à atteindre le cœur. Je sais comment atteindre ton cœur, Camille. Je sais ce que tous tes amis ici, autour de toi, aimeraient savoir sur toi. Je n'ai rien à perdre, après tout. Tout le monde me déteste déjà, et je ne reverrais plus personne. Mais toi tu as tellement de choses que je peux détruire. Alors dis-moi, Camille, ce bébé chat que tes parents avaient offert à ta sœur quand tu avais sept ans, celui que tu as tué par jalousie parce qu'on ne te l'avait pas donné à toi... qu'est-ce que tu crois qu'il ferait, aujourd'hui ? Tu crois qu'il serait heureux, qu'il gambaderait dans ton jardin paisiblement ? Tu as un talent indéniable pour briser des choses, détruire des vies. J'espère que ta famille ne t'en voudra pas trop, tu avais si bien caché ce petit secret, je suis désolé. Ça m'a échappé.
Regardez-moi, tous. Une dernière fois. Regardez-moi vraiment. Lâchez la rumeur, lâchez les semaines de moqueries. Regardez mes bras. Ces marques-là, elles viennent de vous, c'est vous qui avez tenu la lame, à la force de votre mépris et de votre haine. C'est vous qui tiendrez celle qui les tranchera pour de bon. Celle-là. Elle est si proche de mes veines, après tout.
…
…
J'aurais pu finir comme ça. J'espère que vous l'auriez mal vécu. Oui, peu importe à quel point vous m'avez fait souffrir, peu importe ce que vous m'avez fait subir, j'ai encore l'espoir que vous ayez une âme. Un cœur. Que vous réaliserez à quel point vous pouvez blesser les autres. Combien auraient pleuré, combien auraient culpabilisé, combien aurait hurlé si là, aujourd'hui, dans cette vidéo,j'avais posé la lame sur mes veines et pas simplement sur ma table ? J'aurais pu. J'y ai pensé. Mais ça aurait été trop facile, pour vous. De vous en sortir avec juste ma mort sur la conscience. Je veux que vous sachiez que je serais là. Que je vivrais malgré vous. Oui, cette vidéo aurait pu être une vidéo de suicide, mais je suis plus fort que vous."
Elijah coupa la caméra et prit une dernière inspiration, se forçant à regarder à l'opposé de la lame posée sur la table. Il avait été tenté. Vraiment. Quand il l'avait tenu à quelques millimètres de son bras, pendant qu'il filmait, il avait cette pensée, cette tentation d'aller jusqu'au bout, d'aller plus loin. Mais il avait eu la force. De l'écarter. D'être vraiment plus fort qu'eux. Il rangea le rasoir dans un tiroir, fit claquer l'élastique à son poignet pour passer la pulsion. Peu de temps après, la porte de sa chambre s'ouvrit.
"Tu as fait tes valises ?"
Elijah hocha la tête et son père attendit dans l’encadrure de la porte qu'il lui donne son sac et sa valise. Puis l'adolescent se leva, brancha la caméra à son ordinateur pour en extraire le fichier vidéo. Il vérifia juste le son, l'image. Il n'avait pas envie de la regarder jusqu'au bout, il voulait juste être sûr que le début et la fin étaient là, bien coupés. Le reste y serait forcément. Ensuite il mit le fichier sur une clé usb. Il la laisserait à l'école. On lui avait demandé s'il voulait laisser un dernier message avant de partir. Mais il savait que les risques que les professeurs coupent la vidéo en entendant parler de suicide n'étaient pas nuls. Alors il enverrait une copie à tout le monde, après la "projection officielle", si le personnel coupait l'image. Son frère le tiendrait au courant.
Pour l'instant il partait en Angleterre. Ses parents, sa famille le rejoindraient à la rentrée suivante, quand tout le monde aurait été muté puis inscrit. Il était le seul à s'en aller, parce qu'il n'avait pas eu la force de tenir jusqu'à la fin de l'année scolaire. S'il passait un jour de plus dans ce lycée, la lame ne reculerait plus.
Derrière l'écran Prénom/Pseudo : Martel Age : 24 ans Tu nous viens d'où ? : ¯\_(ツ)_/¯ Un commentaire ? : ~~ Accès aux rps -18 ? Oui
Dernière édition par Elijah Desames le Ven 11 Fév - 1:20, édité 5 fois |
| | Andrew RehrinPNJ |:| Directeur de l'université Andrew Rehrin Andrew Rehrin
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Inscription le : 08/08/2017
Né(e) le : 07/04/1898
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- Avarice
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