[Event multimix] Rencontre fortuite

Egon Esper

PNJ |:| Joué par Martel

Sexe :
Taille : 1m78
Race : Inconnue
Pouvoir : Inconnu

Egon se permettait de sortir comme si de rien n'était. La police cherchait un homme maigre, maladif, tout juste échappé d'une prison où on n'avait pas pris la peine de le nourrir autrement que pas intraveineuse. Un homme faible, empoisonné, probablement terré dans un recoin sordide le temps de se remettre. Sous-estimaient-ils ce dont il était capable avec de simples mots ? Sans aucun doute. Sinon ils l'auraient tué au lieu de l'enfermer. Mais il était trop tard, maintenant, et le chaos qu'il percevait en ville avait déjà le goût sucré de la vengeance. On avait oublié à quoi il ressemblait. On ne l'imaginait pas en pleine forme, énergique, débordant d'une vie qu'il n'aurait pas dû avoir. Alors il pouvait se promener librement, sans craindre les conséquences.

C'est alors que son regard se posa sur une jeune fille, au loin. Semblable au reste des gens qui arpentaient cette rue mais pourtant, elle attira son attention. Les tâches noires qu'il voyait sur sa peau indiquaient une race non-humaine, donc quelque chose qu'elle ne connaissait pas. Quelque chose de nouveau, d'inédit. Un petit sourire se dessina sur ses lèvres et il commença à murmurer.

- Le ciel prit une teinte étrange, violacée. Il s'illumina comme sous le coup d'une foudre invisible, brillant comme une aurore boréale. Une neige bizarrement rosée tomba doucement du ciel, mais le fond de l'air semblait annoncer une tempête imminente.

Il serait à son niveau dans quelques mètres. Il referma la bouche, attendant que l'effet de ses paroles prenne vie avant de laisser son visage prendre un air paniqué. Puis il s'avança vers la jeune fille.

- Excusez-moi, j'ai vu que vous étiez... que vous n'étiez pas humaine... Je crois... je crois que c'est moi qui fait ça...

Il leva les yeux vers le ciel, une expression angoissée peinte sur ses traits.

- Je n'ai jamais eu de pouvoir avant, j'avais juste hérité de la race de mes parents, je ne suis pas allé dans votre école et... et le truc que j'ai récupéré fait n'importe quoi...

Le vent commença à se lever et il prit ses mains l'une dans l'autre.

- Vous avez des cours, non ? Vous pouvez m'aider ?

Egon Esper

PNJ |:| Joué par Martel

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Race : Inconnue
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"Je ne sais pas si je pourrais vous aider". Egon dut se contrôler pour ne pas afficher un haussement de sourcil impressionné. Prudente, cette petite. Un peu trop peut-être. Quelles informations la police magique avait-elle données ? À quel point avaient-ils été honnête ? Ces fourbes malsains et cruels n'avaient pas pu tout leur dire. Ils leur avaient forcément fait une version évasive, édulcorée. Il aurait dû envoyer Ylivia enquêter sur les informations données par la police. Personne ne savait qu'elle l'avait aidé à s'évader, elle aurait fait une parfaite espionne. En attendant, il ne pouvait se fier qu'à ce qu'il savait de la police magique. Des ordures sans honneur, sans compassion, sans émotions, manipulateurs et inhumains. Peut-être leur avaient-ils simplement dit de se méfier des inconnus. Il savait déjà que cette gamine n'avait pas récupéré le pouvoir de Dorian McKenzie, sinon il n'aurait pas pu prononcer un mot. Mais des magistrats et des enquêteurs de cette ville avaient le pouvoir de détecter les mensonges. Avait-elle récupéré ce type de capacité ? Dans ce cas, elle ne lui serait pas utile... Il était plus difficile de manipuler quelqu'un qui s'en apercevait. Quelqu'un qui se méfiait. Percevait-elle seulement les mensonges ou comprenait-elle aussi les semi-vérités ? S'il omettait quelques détails dans ses paroles, le saurait-elle ?

En attendant, il décida de jouer le jeu. Tant qu'il ne connaîtrait pas l'ampleur des pouvoirs récupérés par cette jeune fille, il pouvait encore espérer en obtenir quelque chose. Il prit un peu de temps pour se forcer à respirer et à se calmer. Même elle semblait faire cet effort. Pour l'encourager ou parce qu'elle était aussi effrayée qu'il prétendait l'être ? Hm. Intéressant, ça. la peur avait tendance à laisser faire des gaffes. Peut-être qu'il pourrait encore atteindre son but. Il suffisait qu'il trouve une manière de formuler, en esquivant les mensonges. Qu'il teste les limites. Et si c'était peine perdue, il trouverait quelqu'un d'autre. Tout le monde n'était pas aussi prudent, et tout le monde n'avait pas ce genre de pouvoir. Il afficha une expression plus sereine, plus calme, plus naturelle. Continuer de jouer son jeu, et détourner la vérité sans mentir. Ça pouvait s'avérer intéressant. Il avait toujours eu un... don, avec les mots.

- Il semble que j'aie manipulé la météo. Ça dû découler de quelque chose que j'ai fait ou de quelque chose que j'ai dit...

Rien de plus. Il ne pouvait pas ajouter un "mais je ne sais pas exactement quoi". Ça aurait été un mensonge, là ou sa dernière phrase était, dans le fond, entièrement vraie. Emprunte d'une fausse intonation de doute et d'hésitation, mais ses mots n'étaient qu'une description fiable.

- Il... il doit bien y avoir un moyen de l'arrêter...

En vérité, il n'avait que quelques mots à dire. Décrire la fin de la tempête pour qu'elle disparaisse et que le ciel reprenne ses couleurs habituelles. Mais il avait tout le temps pour ça...

Egon Esper

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Les limites de son plan d'origine commençaient à lui apparaître. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle se méfie et à ce qu'elle soit aussi prudente, et il entrevoyait des difficultés à continuer dans sa voie d'origine. Difficile de croire qu'il pourrait en tirer ce qu'il avait l'intention d'obtenir à l'origine. Par contre... par contre il pouvait l'utiliser pour obtenir des informations. Savoir ce que la brigade leur avait dit, ce que les habitants de Londres savaient. Nul doute qu'Anatolie et MacKenzie ne leur avaient pas donné toutes les informations dont ils avaient besoin pour être en sécurité, mais ils devaient bien leur avoir dit quelque chose, ne serait-ce que pour calmer la panique provoquée par son cataclysme. Et il y avait d'autres manières de s'attirer la sympathie d'une adolescente qu'en lui demandant de l'aide pour contrôler un pouvoir devenu fou...

Sa tempête n'était pas dangereuse, du moins pas tant qu'il ne l'avait pas décidé, il pouvait donc se permettre de retarder à loisir la résolution du problème. Et si la situation ne lui apportait rien, il n'avait qu'à laisser sa création se déchaîner suffisamment longtemps pour pouvoir s'éclipser. Il suivit le regard que la jeune fille posait sur le ciel. Elle avait vraiment l'air de réfléchir à une façon logique de résoudre ce problème. C'était mignon... et dommage. Elle lui aurait été utile, s'il avait pu l'utiliser. Enfin... rien n'était perdu. Il suffisait d'un rien, après tout.

Egon hocha doucement la tête. Sa proposition se tenait, n'était-ce pas le plus ironique ? Il aurait suffit qu'elle se méfie moins et il aurait pu avoir toute son intelligence à sa portée... Personne n'avait une morale assez forte pour risquer sa vie, après tout.

- Peut-être que...

Gardant son attitude de personne inquiète, il se tourna vers les nuages et posa ses mains sur ses tempes comme en réaction à une forte migraine. Bien évidemment, rien ne se produisit. Il soupira.

- Ce n'était pas ce geste, alors...

Encore une fois, pas un mensonge. Il ne pouvait pas décemment dire qu'il avait eu une migraine et qu'il avait prononcé la mauvaise phrase – ça aurait été mentir ouvertement – mais c'est ce qu'il essayait de lui faire déduire. Elle était intelligente, après tout. Sans doute comprendrait-elle.

- C'est un sacré chaos, qu'il a provoqué, ce type... Je n'ose presque pas sortir, c'est trop dangereux...

Essayer de discuter... cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas eu l'occasion de parler "normalement" avec quelqu'un. Quand bien même il jouait un rôle et parlait à demi-mots pour ne pas risquer de laisser filtrer un mensonge tout en faisant passer l'idée qu'il voulait, ça impliquait d'avoir l'air de faire la causette, d'avoir l'air amical et normal.

- Vous avez une idée de ce que vous avez récupéré, vous ? Je suis un peu dans le flou.

Il avait toujours adoré manier les mots. Au final, toute cette histoire devenait plus amusante qu'autre chose. Faire croire qu'il ne connaissait pas ses capacités sans le dire ouvertement, prétendre que c'était le chaos ambiant qui l'empêchait de se promener dans les rues... À défaut de lui être utile, elle lui aurait fourni un bon divertissement.

- Vous pensez que si j'ordonne à la tempête de s'arrêter, ça marchera ?

Egon Esper

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Les gens avaient peur, hein ? Un bon point, même si ce n'était pas exactement son but principal. Mais désorganiser la police magique et l'école en leur mettant des centaines de problèmes sur les bras, c'était le meilleur moyen de les atteindre. Bien sûr, il aurait pu leur ôter tous leurs pouvoirs mais... ça aurait été nettement moins intéressant, et moins chaotique. Une ville remplie d'humains, même pour affronter une criminel, était toujours plus facile à gérer qu'une ville remplie de pouvoir incontrôlables. Surtout quand il y rajoutait des éléments supplémentaires.

Alors, cette fille... avait une race qu'elle n'arrivait pas à déterminer et un pouvoir changeant. Est-ce que son pouvoir s'adaptait aux gens autour d'elle ? Ça expliquerait qu'il l'ait rendue méfiante en sa présence. Peut-être qu'il lui soufflait des choses sur ceux à qui elle parlait. Et pour lui, il lui aurait dit qu'il était dangereux ? Ou malhonnête ? Autre chose ? Il avait du mal à croire qu'elle se méfie aussi facilement de quelqu'un. Ou alors elle savait qui il était, mais elle n'aurait probablement pas eu une réaction aussi... neutre.

- Je pensais qu'ils auraient donné plus d'infos... Je n'ai pas pu aller à la réunion de la brigade.

Heureusement, il avait entendu des gens en parler, donc il savait qu'elle avait eu lieu. Mais c'était tout ce qu'il en savait sur cette réunion. Il n'aurait pas pu s'y rendre, pas alors que des pouvoirs permettant de voir l'identité des gens circulaient très certainement dans la nature, mais il aurait peut-être dû y envoyer Ylivia. Ça laissait trop de flou, de ne pas savoir.

- Je sais qu'un gars s'est évadé et qu'il a mélangé les races et les pouvoirs mais...

Mais rien de plus. Ah, il ne pouvait pas être plus honnête qu'à l'instant. Enfin bon, il avait assez joué les enquêteurs, mieux valait continuer d'essayer de résoudre ce problème pour ne pas avoir l'air trop suspect. Il se concentra donc à nouveau sur le ciel, cherchant un moyen de formuler sa phrase.

- Je euh... j'aimerais que le ciel se calme. Que la tempête disparaisse.

Il avait dit ça avec une conviction suffisante mais, évidemment, rien ne se produisit. Il soupira, feignit une expression découragée avant de reprendre un air déterminé.

- Disparais... allez, disparais, stupide tempête !

S'il ne formulait pas sa phrase correctement, ça ne changerait rien. Mais il voulait prendre le temps de réfléchir à une manière de réaliser son objectif de base, et s'il calmait les événements, elle s'en irait. Il en était persuadé. Elle se méfiait trop pour rester plus que nécessaire en sa compagnie.

- Votre pouvoir... vous avez dit qu'il était changeant ? Peut-être qu'un de ses aspects permettrait de m'aider à contrôler mieux le mien ?

Bon, si elle ne le contrôlait pas elle-même, ça ne changerait rien. Mais il ne désespérait pas de savoir exactement à quoi servait ses capacités. De toute façon, il n'avait rien d'autre à faire pour l'instant.

- Ou peut-être que je dois me rapprocher... Trouver un bâtiment assez haut... Si je monte au dernier étage ou sur un toit...

Elle était sûrement occupée avant qu'il débarque mais il devait garder son attention. Si elle partait maintenant, il aurait définitivement perdu ses chances. Cela dit, s'il avait trop l'air de la retenir, elle se méfierait encore plus.

- Désolé de vous embêter comme ça. Vous devez être occupée. Mais je pense que je m'en sortirai si vous acceptez de m'aider encore un peu. D'accord ?

Tant pis, il la remercierait et la laisserait vaquer à ses occupations s'il n'arrivait pas à avoir ce qu'il voulait d'ici à ce qu'ils trouvent un point en hauteur. C'était son point de non-retour. Si elle ne faisait pas ce qu'il attendait d'elle d'ici-là, il trouverait quelqu'un d'autre. Ce serait dommage, cela dit. Son intelligence aurait pu être utile...

Egon Esper

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Cette fille était trop méfiante. Il le constata à sa phrase, étant donné qu'elle ne prit même pas la peine de répondre à sa question directement, préférant revenir sur cette histoire de toit. Il retint un soupir. Ce n'était qu'une excuse, une semi-diversion pour qu'elle reste, mais il lui avait au final fourni l'occasion parfaite de détourner ce qu'il avait dit et de ne pas prononcer les mots qu'il cherchait à lui arracher. C'était un peu crispant, cette absence de confiance. Peut-être qu'il aurait dû l'aborder d'une autre manière, plus discrète, pour qu'elle soit moins susceptible de douter de lui ? Ou alors il n'avait juste vraiment pas eu de chance et était tombé sur la seule fille à des kilomètres à la ronde qui avait un pouvoir permettant de le percer à jour.
Désespérant.

Enfin bon, il joua le jeu jusqu'au bout, la suivant jusqu'à l'endroit où elle avait visiblement l'intention de le mener. À mesure qu'ils marchaient, il lui semblait que l'état de la jeune fille se détériorait. Elle semblait plus stressée, plus nerveuse encore. Avait-elle peur qu'il la pousse du toit ? Il n'était pas si barbare. Mais la façon dont elle regardait le haut de l'immeuble lui était familière. Il avait l'impression de revoir son regard il y a quelque jours, quand il avait frôlé les murs de S'Indarë. Le poids des mauvais souvenirs et une légère angoisse à l'idée de s'y replonger.
Méfiante et imparfaite, donc.

Il écouta à peine ses explications. Il se fichait bien du toit, mais il devait se rendre à l'évidence : il ne pouvait pas insister davantage pour qu'elle l'aide sans avoir l'air louche. Et, de toute façon, elle avait démontré à plusieurs reprises qu'elle faisait bien trop attention à ses paroles. Il l'observa un moment. Il aurait préféré l'avoir avec lui que contre lui, et pas seulement parce qu'elle semblait intelligente et avoir un pouvoir utile. L'affronter alors qu'elle avait l'air d'avoir ses propres cicatrices n'aurait rien d'agréable. Alors il espérait qu'elle suivrait les conseils probables de la brigade magique et qu'elle se tiendrait à l'écart de tout ça.
Et pourtant, une intuition lui soufflait que ça n'était pas le cas.

- Ce n'est pas grave. Vous avez déjà fait beaucoup pour moi.

Il sourit amicalement, posant sa main sur son épaule. Quitte à rester dans son rôle, autant l'être jusqu'au bout. Il n'avait plus aucun intérêt à le faire, certes, mais mieux valait qu'elle ait l'impression d'avoir eu affaire à un homme bizarre, plutôt qu'elle comprenne à quel point.

- Merci. Soyez prudente, en ville. Le monde est bien dangereux en ce moment.

Son intonation était plus douce, plus honnête. L'espace d'un instant, à travers le masque qu'il portait depuis le début, le vrai Egon pointa le bout de son nez. Voir la souffrance des souvenirs sur le visage de cette fille avait rappelé à lui un passé qu'on avait tenté de lui arracher à coup de chaînes, d'aiguilles et d'expériences. Il retira sa main, restant un instant immobile à la regarder avec bienveillance. Tout ce qu'il aurait pu être, si cette flamme de vengeance ne lui rongeait pas les entrailles.

- Vous avez l'air d'avoir besoin de repos, dit-il d'une voix calme. Je ne vais pas vous retenir davantage.

Et sur un dernier signe de la tête, il entra dans le bâtiment et chercha le fameux escalier B. Au fond, l'endroit où il se trouvait importait peu mais, si elle se tournait à un moment ou un autre, mieux valait qu'elle le voit au niveau du toit. Histoire de garder sa couverture jusqu'au bout.

- … et la tempête prit fin, cessant de menacer le monde de ses couleurs grondantes, murmura-t-il une fois à l'air libre, le regard fixé sur ses nuages rougeoyants.

Le ciel s'apaisa lentement, chassant toute trace de la fausse catastrophe qui, l'espace d'un moment, avait grondé au-dessus de Londres.

Egon Esper

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Le regard fixé sur le ciel redevenu bleu, Egon soupira. À vrai dire, la naïveté de son époque lui manquait un peu. Savoir qu'il n'avait pas été le seul à souffrir assez pour finir dans son état n'était clairement pas pour lui faire du bien. Au final, sa vengeance contre la brigade et contre Dorian risquait de mettre en danger des personnes qui, comme lui, n'avaient rien demandé. Mais avec un peu de chance, ils récupéreraient de nouvelles cartes qui leur permettrait de repartir sur une meilleure base. Il se fichait de ce que prétendaient les enseignants de son époque, et sûrement ceux de maintenant : la zone magique ne créait pas les races et les pouvoirs selon la personnalité. Sinon, il n'aurait jamais hérité de tout ça.

Il ne renoncerait pas. Il voulait voir Dorian souffrir comme il l'avait fait souffrir, il voulait voir Malicia se décomposer sous les conséquences de sa cruauté et de sa tyrannie. Mais cette fille avait réussi à le toucher suffisamment pour qu'il espère qu'elle ne serait pas là, le jour où il atteindrait son but. Elle était méfiante, et intelligente, elle ne viendrait pas, pas vrai ? Pourtant, quand il se retourna, elle était là. Et il commença à douter de la certitude qu'il venait d'essayer de s'imposer. Sa voix était calme, mais son esprit entra aussitôt en ébullition.

- Qu'est-ce que vous faites là ?

Et surtout, depuis combien de temps ? L'avait-elle entendu ? Avait-elle compris qui il était ? Si la magistrature n'avait vraiment donné que peu d'infos à son sujet, elle ignorait peut-être de quoi il était vraiment capable. Mais ça ne voulait pas dire pour autant qu'elle ne comprendrait pas que quelque chose était louche si elle avait vu la facilité avec laquelle il avait arrêté la catastrophe.

- Je croyais que vous ne vouliez pas monter...

Il était passé proche de la catastrophe. Il ne pouvait pas laisser quelqu'un qui connaissait son vrai visage et qui l'aurait reconnu arpenter librement la ville et préciser son signalement à la brigade. Pour l'instant, ils cherchaient un homme maigre, faible et chétif, fragilisé par des années d'emprisonnement. Il comptait là-dessus pour passer inaperçu le plus longtemps possible. Si elle comprenait...

Nerveux, il fit un pas dans sa direction. Il avait souhaité qu'elle ne viendrait pas risquer sa vie quand il accomplirait sa vengeance, mais elle n'avait pas attendu jusque là. Son cœur se serrait à l'idée qu'il serait peut-être forcé de lui faire du mal. Si elle comprenait, si elle savait...

Egon Esper

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Elle était là. Pourquoi ? Elle n'avait pas l'air en colère, terrifiée ou indignée. Alors elle ne l'avait pas entendu ? Ou bien elle n'avait pas compris, peut-être. Dans tous les cas, il se rasséréna un peu peut-être qu'elle avait juste été un peu curieuse, ou peut-être qu'elle avait voulu affronter en face la raison pour laquelle elle tenait à rester éloignée de ce toit. Egon resta silencieux, la regarda hésiter comme si elle n'osait pas franchir une limite mystérieuse qui échappait à son regard. Que s'était-il donc passé sur ce toit ? Pourquoi avait-il vu autant de douleur et de désespoir en elle avant qu'elle ne refuse de venir ? Pourquoi l'avait-elle suivi, finalement ? Il ne comprenait pas ses motivations. Lui qui l'avait trouvé trop prudente et trop méfiante, il se prenait maintenant à la trouver presque trop innocente. Comme si sa douleur était réversible.

Et puis elle donna sa raison. Et un pâle sourire finit par flotter sur les lèvres de l'homme. Lire de la tristesse en lui, hein... Les cicatrices se repèrent et se reconnaissent. Il ferma les yeux un instant, comme s'il méditait ses paroles. Il avait voulu qu'elle l'aide, il avait voulu l'utiliser et maintenant, face à sa compassion, il aurait fait n'importe quoi pour qu'elle ne se mêle pas de cette histoire. Il aurait pu. Dans son état actuel, il sentait qu'elle avait baissé ses barrières, et il aurait donc probablement pu sans problème s'assurer qu'elle ne serait pas là, quand il serait enfin prêt. Mais cette méthode n'était pas ce qu'il avait envie d'utiliser.

- La compassion finira par vous coûter cher, si vous la confiez à la mauvaise personne.

Encore une fois, l'honnêteté dans sa voix différait de ses paroles contrôlées et manipulatrice. Ce n'était pas une menace, juste un constat, un conseil peut-être. Son propre esprit lui rappela toutes les choses et toutes les personnes chez qui il avait cherché à obtenir cette fameuse compassion. Dorian, Malicia, les geôliers, les scientifiques, les médecins. Personne n'en avait démontré une goutte, un centième, le moindre petit signe. Ce n'était qu'un travail. Et ce n'est qu'une vengeance. Mais il n'avait peut-être pas besoin d'y mêler quelqu'un qui avait visiblement eu sa part de souffrance, quelqu'un qui trouvait, malgré ça, la force de s'inquiéter pour un inconnu.

- Mais c'est gentil à vous de vous inquiéter... cela fait bien longtemps que je n'avais pas vu ce genre de regard...

Un regard sans haine, sans colère, sans peur, sans mépris, un regard avec des émotions qui n'étaient pas écartelées par une logique pure et implacable.

- J'ai vu la même chose dans vos yeux. Quand vous les avez posés sur ce toit.

Et elle, de quoi avait-elle peur ? Qu'avait-elle vécu ici qui fasse apparaître autant de cicatrices sur son âme ? Pourquoi s'intéressait-il à la vie d'une gamine qu'il était prêt à sacrifier à sa cause à peine quelques minutes plus tôt ?

Egon Esper

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Comment en étaient-ils arrivés là ? La dernière chose qu'il souhaitait, c'était d'avoir qui que ce soit dans cette ville qui puisse connaître quoi que ce soit sur lui ou remonter sa piste avant qu'il n'ait mis Dorian et Malicia hors d'état de nuire, et pourtant il était là, à discuter avec cette fille comme si les vingt dernières années n'avaient jamais eu lieu, comme s'il n'était pas un fugitif évadé des prisons souterraines de Londres. Il aurait pu être comme ça en permanence, s'il n'y avait pas eu toutes ces histoires. Silencieux, il l'écouta. Il n'avait aucun mal à imaginer la scène, à voir autour d'eux ce qu'elle lui décrivait. Son imagination avait toujours eu cet avantage de devenir presque vivante.
Quand elle ne devenait pas littéralement vivante, bien entendu.

Le vide. Cela rappela à lui ses propres souvenirs. La sensation brûlante dans ses veines, au début, jusqu'à ce que son esprit ne soit plus qu'une ombre flottant dans le vide de l'obscurité. Ils avaient anesthésié sa conscience pendant si longtemps qu'il avait découvert un tout nouveau monde à sa sortie. Il connaissait le vide, l'impression que le monde disparaîtrait bientôt, mais que ce bientôt n'arrivait pas, ou pas assez vite.

- Il semble que vous n'y ayez pas sombré. Une âme charitable vous a tiré des tréfonds ? Ou de la magie ?

Une main tendue pour remonter des abysses où elle n'aurait jamais dû s'effondrer. Comme lui. La différence étant, sans doute, qu'elle n'avait pas eu besoin d'attendre 20 ans pour qu'on l'arrache à son propre vide. Quel âge avait-elle ? Sûrement le même âge que lui à l'époque où on l'avait traîné dans les ombres pour ne jamais lui laisser l'autorisation d'en sortir.

- Ceux qui nous arrache aux ténèbres valent tout l'or du monde, pas vrai ?

Avec un petit soupir, il releva son visage vers le ciel. Il n'y avait qu'une personne dans ce monde à qui il ne ferait jamais de mal. Une qu'il s'était jurée de protéger quoi qu'il arrive. Elle l'avait sorti de l'enfer, après tout. Et lui permettait de déchaîner les sien sur le monde. Plus calme, il glissa ses mains dans ses poches, posant à nouveau son regard bicolore sur l'adolescente qui lui faisait face. Il ne lui souhaitait pas sa vie. Mais elle n'avait pas l'air d'avoir hérité de la même malédiction que lui.

- C'est pour ça que vous aviez peur de moi ?

À raison, mais la question n'était pas là. Il avait envie de comprendre d'où venait la méfiance de cette jeune fille, et cette histoire tragique récente était peut-être la réponse la plus simple à sa question.