Because the past always comes calling [Krystal Hamilton]

Je me sentais étouffer. Totalement. Et peu importe ce que me disait la voix dans ma tête, je ne parvenais pas à me calmer. Après tout, j'entendais encore sa voix. Je l'entendais me dire des horreurs que j'aurais voulu oublier à jamais. Des horreurs qui m’étouffaient toujours plus alors que je gardais les yeux grands ouverts, les mains tenant mon tee-shirt au niveau de mon cœur. Mes joues se noyaient de larmes alors que je ne parvenais pas à sangloter à cause de mon état.

Ne faisant plus du tout attention à ce qui m'entourait, je ne remarquai pas que Krystal s'approchait de moi. En fait, ce n'est que lorsqu'elle m'attrapa les épaules que je repris légèrement pied et entendis sa voix. Je ne la compris cependant que lorsqu'elle me prit le visage pour que je la regarde. La terreur était l'expression qui se lisait dans mon regard et chacun de mes traits. Réalité et souvenirs étaient comme mélangés jusqu'à ce qu'elle me fasse une pichenette. La seconde en moins d'une heure ! Mais, au moins, cela eut pour effet de m'aider à me reprendre. Portant ma main sur mon front douloureux pour multiples raisons, je la regardai en essayant de comprendre son geste. Je ne dis rien. Je n'en avais pas la force. Voilà pourquoi je suivis son exemple quand elle prit de grandes inspirations, longuement. Grâce à elle, je me remis à respirer plus calmement même si je tremblais toujours un peu.

Une fois l'exercice terminé et mon calme retrouvé, je m'essuyai le visage doucement à l'aide de mes mains. Cela, le temps que Krystal me laissa avant de se tourner à nouveau dans ma direction, assise sur le lit. Sincèrement, je me sentais tellement faible que j'en avais honte… Autant que j'avais peur. Et ma colocataires dû s'en rendre compte étant donné qu'elle tenta de me rassurer. M'essuyant à nouveau les yeux, je lui répondis, la voix tremblante :

-Je suis désolée Krystal… Oui, oui, je te fais confiance… Sans toi, mon cadavre serait déjà en train d'être disséqué dans un laboratoire…

Ou pire ! Mon dieu… Fallait que je me calme. Je me couchai donc dans mes oreillers en fermant les yeux et respirant profondément. Je me sentais terriblement fatiguée. Un peu comme si je venais de me faire rouler dessus par un rouleau compresseur. Ou pire, pire écartelée. … Il allait falloir que je cesse de faire dans le pessimisme et que je fasse, effectivement, totalement confiance à Krystal. Et c'est dans cette optique que je lui demandai, lasse :

-Qu'as-tu en tête ?

Sa première réponse me fit rire silencieusement. Ça lui ressemblait tellement. Je ne répondis donc rien, profitant du moment que ce genre de réponse m'amusait. Après tout, qui pourrait dire combien de temps cela continuerait. Puis, quand elle redevint sérieuse, je l'écoutai avec autant d'attention que je le pus. Ainsi, je hochai la tête pour lui confirmer que je parlais bien de l'enquête. Malheureusement, elle ne voulut rien me dire, ce qui me fit grimacer. Je comprenais qu'il fallait que je me repose mais…

Je ne répondis rien d'autre que le soupire de résignation qui traversa mes lèvres alors que je tournais la tête vers le plafond. J'avais besoin de m'occuper l'esprit. J'avais peur. Pas que des hommes que Krystal semblait bien décidée à faire tomber de haut. Mais aussi que mon passé ne cesse de me torturer sans que je l'ai demandé. Malheureusement je me savais assez fatiguée pour perdre chacun des duels que je pourrais commencer avec ma colocataire. Jamais, dans cet état, je ne pourrais avoir gain de cause. Voilà pourquoi je la laissai retourner à ses occupations alors que j'essayais de me reposer.

Malgré les différentes tentatives et ma fatigue, je ne parvins pas à m'endormir. A chaque fois que je fermais les yeux, je me voyais soit dans la ruelle, soit dans la maison enflammée de mon enfance. Du coup, je finis par abandonner l'idée de m'endormir avant que mon corps le fasse de lui-même.

Ce n'est vraiment pas une bonne idée. Non seulement c'est mauvais pour ta santé, mais en plus elle risque de te gronder.

*Ce n'est pas comme si ça changerait quoi que ce soit pour le moment…*

M'ennuyant totalement à regarder le plafond immaculé, je finis par tourner le regard sur la jeune femme qui travaillait d'arrache pied. Moi aussi j'aurais voulu pouvoir faire quelque chose d'utile au lieu de rester comme ça, sans rien faire. Néanmoins, le rappel à l'ordre de Krystal me rappela ma condition et donc cette impossibilité de faire plus. Et il était certain que, peu importe les bonnes résolutions, si c'était à refaire je le ferais, même si cela me conduisait à me sentir aussi impuissante qu'en l'instant.

Après plusieurs minutes d'un silence seulement perturbé par ses doigts pianotant sur le clavier de l'ordinateur qu'elle avait amené, elle se tourna vers moi pour me demander de me reposer. Son ton était alors plus doux, comme pour tenter de me convaincre. Mais, détournant la tête pour regarder à nouveau le plafond, je lui répondis d'une voix pourtant ensommeillée :

-Je n'y arrive pas…

Je me sentis surprise de sentir, après un court instant, sa main prendre la mienne et l'enlacer de façon à avoir le plus de contact possible. Je me mis à la caresser un peu maladroitement pour la remercier silencieusement. Elle était vraiment une gentille personne sous ce masque qui agissait comme une carapace. Je ne doutais plus qu'elle ait pu avoir ses propres difficultés et je me sentis terriblement coupable par rapport à toutes les horreurs que je lui avais dites. Et penser à elle, ce que nous avions commencé à construire et tenter de nommer cette relation quelque peu particulière me permit de sombrer dans le sommeil.

Il me fallut plusieurs jours pour retrouver un état de santé assez satisfaisant et quitter l'hôpital. Enfin ! Je me sentis comme soulagée de quitter enfin ces quatre murs fortement désagréables. Après tout, cet endroit me faisait bien trop penser au premier souvenir que j'avais eu avant “le trou noir”. J'avais donc récupéré mes affaires et étais sortie assez rapidement pour régler les dossiers avec l'administration. Bien entendu, on m'enverrait la note après coup et je pouvais être certaine qu'elle serait salée !

Cela fait, je sortie de ce bâtiment et partie pour l'académie en évitant soigneusement l'endroit où je m'étais fait agresser. Quitte à faire un détour monstre, il était hors de question que je fasse remonter des souvenirs que je n'avais même pas encore accepté. Comment aurais-je pu en si peu de temps ? En vérité, je savais pertinemment que, tant que ces hommes n'auraient pas été arrêtés, je ne serais pas tranquille. Voilà pourquoi la première chose que je fis en arrivant à la chambre fut d'allumer mon pc et de pirater les caméras aux alentours pour débuter une surveillance continue des lieux. Que ce soit pour ma sécurité, ou celle des autres. Après tout, nous étions tous des créatures magiques…