Farewell, happy fields, [Ft. Kaylee, Kaylee, Lova, Thomas, Rosa, Krystal] (-18)

Cet endroit m’épuise. Cet endroit me rend folle. Je veux rentrer chez moi… Je veux retrouver Kaylee…mes amis… ma famille… Je veux partir. Laisser moi partir… S’il vous plait. Les larmes continuent de glisser sur mes joues alors que je ne la regarde plus. Je ne dois pas l’écouter… Elle dit n’importe quoi… Elle ne cherche qu’à me briser… Ils ne m’aiment pas eux… ils s’en moquent de moi… De mon bonheur… Je ne suis qu’un pion pour eux… Je ne dois pas l’écouter. Kaylee m’aime, elle l’a répété plusieurs fois ce soir-là. Tout va bien…

- Aimer ? Aimer ? Ha ! Un ange aimer ? Une créature divine aime toute la création, ce que tu fais c'est du favoritisme. Ce que tu fais c'est aussi de l'égoïsme. Tu désirais être admirée dans ton narcissisme et donc tu as arraché une mortelle à son destin pour l'accrocher à toi !

Non… C’est faux… Je ne l’ai pas arrachée à son destin… Elle n’était liée à personne… Elle était… Je ne suis pas égoïste… Je me mords la lèvre… Alors que des souvenirs me submergent… Notre rencontre… le fait qu’elle me détestait… Le fait que c’est moi, qui suis tombée amoureuse… C’est moi, qui l’ai embrassée alors qu’elle ne voulait pas… Je me suis imposée à elle…

- Combien de temps a-t-elle dû souffrir ? Combien de temps comptes-tu encore lui faire subir des coups et blessures ?

Je me fige à ses mots, écarquillant les yeux, et mes bras viennent enlacer mon buste dans un geste de protection. Des coups… Des blessures… Comment savent-ils ? Mais… Je ne suis pas responsable… Ce n’est pas moi…

- Je n’ai…rien fait… Elle est heureuse…
- Ne le nie pas, on sait tout aussi bien que toi que tu en es la cause. Sans toi, cette mortelle aurait vécu une vie ordinaire et suivi son véritable destin. Tu lui as arraché son avenir, un forgé par les mains divines ! Tu as défié le plan suprême et cela pour être aimée ?

Non… C’est faux… Ce n’est pas moi qui lui ai dit de se mettre en danger… Je veux juste la protéger… Je veux juste… Qu’elle soit heureuse… Je veux juste…être heureuse…

- Combien de personnes encore vas-tu arracher de leur route pour les envoyer sur une spirale infernale ? Vas-tu seulement essayer de réparer tes erreurs, Ange déchu, indigne du titre de "Cupidon". Comment peux-tu prétendre savoir aimer quand tu ne sais que détruire ?

- Je…ne détruis rien… Je…

Je ne peux plus retenir mes larmes alors que la voix de mon bourreau prend soudainement plus d’ampleur. Mon cerveau, mes oreilles s’y rattachent, pour ne plus encore cette goutte. Je ne l’entends plus… Mais les paroles qui me parviennent sont dévastatrices. Tous mes doutes… tous mes complexes s’installent aux creux de mes oreilles… Est-ce que je la mérite… Est-ce qu’elle est vraiment bien avec moi… Ne suis-je pas sa Némésis… ? La balle dans l’épaule… la tronçonneuse… toutes ces blessures qu’elle a eu par ma faute… Je les ai vu…

- Ah bon ?

Sa main vient attraper mon visage, et je n’ai pas la force de l’envoyer balader. Mon regard se plante dans le sien, alors que les larmes continuent de perler sur ma peau. Je la voix sans vraiment la voir, comme si on voile s’était déposé sur mon regard…

- Tu crois ? Oh comme tu es naïve... Ou alors c'est que tu le sais mais tu mens. Tu ne vas pas me mentir quand même ? Non ? Car je suis bien la première à savoir quand on détruit une personne. Faut pas se faire d'illusions, les sourires ne veulent pas tout dire. Tout le monde peut mentir, peut faire des faux sourires. Mais ça...

Elle relève son masque doucement, et mes yeux se concentrent sur ce qui se découvre. Et quand je vois des cicatrices atroces, je me fige dans une expression d’horreur alors qu’un frisson désagréable parcourt tout mon corps.

- L-Lâchez-moi…

J’essaye de me reculer, mais elle me tient fermement, décidée à me faire subir la vision de sa bouche déformée et de son visage lapidé.

- Ça, ça ne peut pas mentir.

Elle rebaisse son masque, mais je n’arrive pas à détourner mon regard de son visage. La vision de ses cicatrices me hante. Qu’est-ce qu’elle va me faire ? Qu’est-ce qu’elle veut ? Je veux juste partir… Je veux juste vivre ma vie tranquillement… S’il vous plait… Les larmes coulent de plus belle alors qu’elle commence à me raconter son histoire… Son passé. Je l’écoute à moitié, la coupant parfois pour murmurer que c’est faux… Que Kaylee n’est pas comme ça… Qu’on s’aime… Qu’on se protège et qu’on ne se ferait jamais de mal. Jamais je ne lui ferais de mal… Je veux juste son bonheur… Je veux juste vivre une histoire d’amour avec elle… Je veux qu’elle m’aime… qu’elle me prenne dans ses bras… qu’elle m’embrasse… Elle me manque… je veux la voir…

- Ne laisse pas cette histoire finir en tragédie aussi à cause de ton égoïsme, non ? Ce serait particulièrement cruel de ta part...

Mon… égoïsme… Je secoue la tête. Je ne suis pas… égoïste ! Je…

- Pour l'instant... Tu as l'air... si chétive...

Je sens subitement ses mains sur moi, glissant sur mes côtes alors que je me recroqueville, me tortillant pour éviter qu’elle me touche. N-non… Pas… Pas mes côtes… C’est désagréable. Arrêtez ça…

- Ne…t-touchez pas…

Mais elles glissent sur mes hanches et je n’arrive pas à me libérer de ses doigts, prise d’horribles frissons qui me parcourent entièrement. Je… Je veux vomir… Il n’y a qu’elle… Seulement…elle… Personne d’autre.

- Tu pourrais être si belle... Tu pourrais devenir tellement plus si... oh...

Je suis complètement contractée, recroquevillée sur moi-même alors que tout mon corps rejette son toucher. Ses mains descendent sur mes cuisses et je ne suis prise de nausées alors que le souvenir de mon agression me revient en mémoire. Non… Non pas ça… Arrêtez… Ne me touchez pas… Mais rapidement, ce toucher dérangeant s’arrête, ce qui me fait soupirer de soulagement, un soupir imperceptible qui ne calme en rien les battements de mon cœur.

- ... je leur avais dit de TOUT retirer !

Je sursaute quand elle attrape mon cœur et commence à le tirer pour l’arracher. Prise de panique en comprenant ce qu’elle essaye de faire, pousser par la peur de perdre encore ce qui m’est de plus chère, j’attrape ses poignets pour la faire lâcher le bijou.

- Qu'est-ce que tu portes d'autre ?! Pécheur ! Tentatrice ! Démone !
- Lâchez-ça !!!
Lâchez-ça !!!
Lâchez-ça !!!
Lâchez-ça !!!

Mais elle me pousse, et je me retrouve dos à elle, les mains au sol, pour m’empêcher de me cogner le visage contre le béton froid. Elle cherche d’autres bijoux et quand je la sens arracher mon bracelet, les larmes coulent de plus belle. Maman…

- Arrêtez…. Arrêtez, s’il vous plait…

Mon bourreau revient sur le collier, réessayant de l’arracher de mon cou, et je l’agrippe de toutes mes forces, priant pour qu’il ne se brise pas. Pas lui… Pas Kaylee… Laissez-la moi ! Mais plus ça va, plus elle essaye et plus le collier se resserre autour de ma gorge. J’écarquille les yeux alors que je me mets à suffoquer, l’air rentrant de plus en plus difficilement dans mes poumons. E-Elle m’étrangle !! Elle… Et quand je commence à faire des bruits de suffocations, elle finit par lâcher avec un grondement de frustration, et je m’écroule en toussant.

- Tu vas rester seule dans cette pièce pour expier tes péchés. Je reviendrais voir si tu admets tes fautes.

Après ça… je me retrouve de nouveau seule… Avec le noir… et la goutte… Je ne parle plus… Je sais que les seules choses qui me répondront sont la goutte et l’écho… Doucement, lentement, Je me masse la gorge pour apaiser la douleur provoquée par l’étranglement, alors que je toussote encore un peu. Mes larmes ne se tarissent pas, je n’arrive pas à m’arrêter de pleurer, reniflant bruyamment. Il faut… que je sorte d’ici… Mais comment… Je n’ai pas d’espoir… Je ne sais pas où est la porte… je ne vois rien… du tout…
Soudainement… une douce lumière chaude éclaire mon corps. Je frissonne sous cette soudaine chaleur et baisse les yeux sur la source de lumière, surprise.
Délicatement, mes doigts attrapent le petit cœur qui scintille d’une couleur oranger apaisante. Dans le cœur, on dirait un liquide… Du soleil liquide…

- K-Kaylee…

Fascinée, charmée, je n’arrive pas à détacher mon regard du collier dont la lumière danse. Il me réchauffe… Il réchauffe mes paumes, et petit à petit, un sourire se dessine sur mon visage. Je l’observe… Je m’y raccroche… Je n’entends plus rien. Tous mes sens sont focalisés sur l’amour de Kaylee… Il n’y a plus de goutte… Plus d’écho… Plus d’anges… Juste elle et moi…

…

Je ne sais pas combien de temps s’est écoulé… J’ai perdu la notion du temps. J’ai faim… J’ai envie de dormir… Mais je n’ai pas froid. J’ai une petite bouillote au creux de mes paumes… Ma lueur d’espoir, je la tiens près de mon cœur.
Mais ce que je redoutais arrive… La lumière s’éteint de plus en plus. Mon visage se déforme, retrouvant cette expression de désespoir que j’avais précédemment. Je secoue le cœur, essayant de le rallumer, alors que je chuchote.

- N-non… Reviens… Ne…pars pas…

Et je me retrouve de nouveau dans le noir… et la goutte est de retour… Et le froid… et l’humidité… et la peur. Quand soudain, la porte s’ouvre, me faisant sursauter.

Je ne vois personne. Le noir est omniprésent dans cette pièce, image de mon enfer, illusion de ma fin. Qu’est-ce que je vais devenir ? Cette goute emplit mon oreille, me captive de nouveau et j’essaye de lui échapper malgré moi. Mon regard se pose sur le cœur noir, invisible dans l’obscurité, comme la lumière d’un phare évanouit dans l’horizon… Pourquoi… ? Pourquoi s’est-il éteint ? J’ai l’impression que Kaylee s’éloigne… Ne m’abandonne pas… Reste… J’ai besoin de toi…

- Confesses-tu tes pêchés ?

Sa voix me fait sursauter alors que je me fige, mes mains se resserrant autour de mon médaillon, le protégeant de sa vue. Mon cœur se met à accélérer alors que des frissons de peur parcourt mon échine. Je ne la vois pas… Où est-elle ? Que veut-elle ? Je veux qu’elle parte… Je préfère être seule.

- Confesses-tu tes pêchés ?

Sa voix se fait plus forte, et je me crispe encore plus, murmurant que je n’ai rien fait. Je n’ai rien à confesser… Je n’ai rien fait de mal. Je n’ai fait que l’aimer… Je n’ai fait que la soutenir… Comment pourrait-on me punir pour ça ? Pourquoi me punirait-on ? Je ne comprends pas…

- Confesses-tu tes pêchés ?
- Je n’ai rien fait de mal !

Je me tourne dans la direction de la voix, la défiant. Il faut que je sois sûre de moi. Il faut que je sois forte ! Pour Kaylee… Pour ce message que m’a envoyé son collier. Ce message d’espoir qui fait vibrer mon cœur. Cette lueur dans l’obscurité de cet enfer. Mais des pas s’approchent de moi, des pas qui martèlent le sol et me font perdre de ma superbe. Quand soudainement, elle me frappe de nouveau et je m’écroule au sol, la paume contre ma joue meurtrie.

- Confesses-tu tes pêchés ?

Je veux qu’elle arrête ! Je ne comprends pas ce qu’elle cherche… Que veut-elle que je dise ? De quels péchés parle-t-elle ? Je veux comprendre ! Plus tôt je comprendrais, plus tôt je partirais d’ici ! L’écho et la goutte d’eau m’obnubilent, je n’arrive pas à me concentrer correctement. Fatiguée, craquant de plus en plus, je lève les yeux vers la voix, les larmes dégoulinant sur mon visage. Je veux dormir… Je veux partir… Je veux me recroqueviller dans ses bras…

- Je n’ai rien fait…

Mais la voix de mon bourreau continue, elle martèle mes oreilles de cette question que je ne comprends pas. Elle tourne autour de moi, la goutte, l’écho, ses intonations qui changent tout le temps, j’ai l’impression que ma tête va exploser ! Les larmes coulent de plus belle alors que la fatigue prend de plus en plus le dessus… Je me recroqueville sur moi-même, posant mes mains sur mes oreilles. Je ne veux plus l’entendre. Je veux être seule… Je veux qu’elle me laisse ! Qu’elle parte ! J’ai besoin de calme ! Je sens que je vais craquer, j’ai envie de me battre et en même temps, je me sens si faible, si vulnérable, nue et sans défense, à la merci de cet ange qui ne montre aucune pitié pour moi. Alors, la seule chose que je peux faire, c’est répéter « non », le répéter encore et encore en réponse à sa question.
Puis le silence, enfin la goutte, redevient le son principal de cette pièce froide et obscure. Je me détends un peu.

- Ne désires-tu pas sortir de cet enfer ?

À ces mots, près de mon oreille, je sursaute violemment, le cœur battant à tout rompre alors que je me recroqueville et que les larmes reprennent leur cascade le long de mes joues. J’en ai assez… Oui ! Je veux sortir ! Je veux partir ! Je n’en peux plus… Je veux retrouver mes amies… je veux retrouver des bras accueillants et réconfortants !

- Laissez-moi partir... s'il vous plait... Qu'est-ce que vous voulez de moi exactement ?

Je ne comprends pas… Sa voix n’est jamais au même endroit. Elle joue de l’espace et du noir pour me déstabiliser. Ce qui me perd encore plus. Mon crime ? Qui ai-je trahi ?... Mes pleurs collent sur ma peau et je renifle, mes bras venant s’enrouler autour de mon corps pour me serrer dans une recherche de consolation. Et quand cette fois, elle parle de mettre des gens en danger mortel et me reproche d’être un mauvais ange, je serre les paupières et me mets en boule. C’est faux ! Tout ce qu’elle dit est faux ! Elle ne sait rien ! Rien de ma vie ! Rien de ce que j’ai vécu ! Je suis quelqu’un de bien !

- Je n'ai rien fait de mal ! Personne n'est mort ! Personne n'est mort à cause de moi ! Je suis gentille !

En réponse, c’est un rire cruel qui tord mon visage d’une détresse sans nom. J’ai peur… J’ai peur d’elle. Je n’arrive pas à savoir de quoi elle est capable. Je ne la vois pas, mais elle me voit, elle est réellement en position de force. Je ne me sens pas capable de me défendre… Me battre me fatigue… Mon cerveau me hurle d’abandonner… de faire ce qu’elle dit… Mon instinct de survie qui me dit de ne pas bouger, de supporter et d’attendre que ça passe… Attendre qu’elle se lasse… Attendre qu’elle parte…

- Personne ? Allons...

Personne… personne n’est mort… Personne n’est mort pour moi. Mais soudain, je sens des doigts sur mon épaule droite qui me font sursauter. Je me fige, ne bouge plus et attends, le cœur battant si fort qu’il me fait souffrir, et haletante. Un souffle chaud et désagréable s’approche de mon oreille et je déglutis, sur mes gardes.

...Bang...

J’écarquille les yeux, figée, incapable de bouger. Je pleure encore, et encore, silencieusement, le cœur meurtri en comprenant à quoi elle fait référence. Cette blessure… cette blessure que je n’ai jamais oser regarder… cette blessure qui me sert le cœur… cette blessure dont je suis responsable… Cette blessure qu’elle n’aurait pas eu si elle n’avait pas eu l’intention de me protéger… Cette blessure…qui me hante… Je me décompose quand je comprends que finalement… ils en savent beaucoup trop sur moi…sur Kaylee… Comment pourrais-je me battre… Ils ont trop de cartes dans leur jeu… Je ne suis qu’un pion… je suis manipulable… Finalement… Jamais je ne serais capable de protéger ceux que j’aime…
Anéantie, je murmure, le regard dans le vide, le visage déformé de souffrance et de détresse.

- P-Pardon... pardonne-moi... Pardon...

Je comprends maintenant… Je comprends tout ! Voilà mes péchés… Je l’ai mise en danger… Si je n’étais pas là, si elle ne me connaissait pas, elle n’aurait jamais eu cette blessure ! Si je n’étais pas tombée amoureuse, si je ne m’étais pas rapprochée d’elle, jamais, au grand jamais elle ne se serait mise en danger !! Tout est de ma faute ! Je comprends maintenant ! Si je veux la protéger… Je dois m’éloigner. Je sens mon cœur se briser. Je n’aurais pas dû… Je n’aurais pas dû venir la chercher chez le docteur… J’aurais dû accepter sa décision… J’aurais dû l’écouter. Mais j’étais trop égoïste !
Pleurant encore, n’arrivant pas à calmer mes hoquets de tristesse, et mes mains venant essuyer mes yeux humides, en vain, je m’exclame.

- Pardon ! Je ne voulais pas... Je ne voulais pas qu'elle se mette en danger pour moi ! Je ne voulais pas.... C'est de ma faute ! Si je n'étais pas tombée amoureuse...elle n'aurait pas toutes ces cicatrices ! Pardonnez-moi !

Je n’arrive pas à me calmer. Je me sens tellement coupable. Je n’ai fait que me tromper. Je ne voulais que la protéger et pourtant, je n’ai fait que la mettre en danger. Je suis dangereuse pour elle. Alors il ne faut pas qu’elle m’approche ? Il faut qu’elle s’éloigne… ? Je n’ai pas envie qu’elle s’éloigne… Sans elle… je ne suis plus rien… Je n’ai plus de raison de vivre… plus de raison de me battre… Est-ce que je devrais la protéger de loin ?
Doucement, délicatement, je sens des bras s’enrouler autour de moi et mon visage s’enfouit dans son épaule, et, petit à petit, la froideur de la pièce disparait pour laisser place à mon jardin d’Eden…mon paradis… et mon cœur s’allège, une odeur sucrée emplissant mes narines.

- C'est bien, c'est bien. Je te pardonne. Dieu te pardonne. Tout va bien. Tu vois, ce n'est pas si difficile que ça...

Elle me pardonne ? Dieu… me pardonne ? Je sens un immense poids se levé de mes épaules, et, de soulagement, je pleure de plus belle. Mes doigts viennent s’agripper à son haut, quémandant son attention, son réconfort, et son appréciation. Je me sens mieux… Je ne veux plus être dans la pièce froide… Et je comprends que pour ça, il faut qu’elle soit contente de moi. Alors je vais la contenter… Je vais me confesser… Je dirais tout ce qu’elle veut ! Je veux juste rester dans mon jardin… Mon front se colle contre son épaule alors que j’entends sa voix, devenue douce et maternelle, murmurer contre mon oreille.

- Il n'y a pas de mal à pleurer. Pleure et laisse derrière toi les cendres de ta vie humaine. L'on est pas comme eux. Les anges ne peuvent qu'apporter le malheur quand ils s'attachent. Mais sois consolée car elle ne craindra plus rien à présent. Elle ne craindra plus rien...

Ses mots m’apaisent et quand elle me dit que Kaylee ne craindra plus rien, je lève mes yeux mouillés vers elle, vers son visage immaculé, sans cicatrice, pleine d’espoir. C’est vrai ? Kaylee se retrouve souvent dans des situations dangereuses… C’était vraiment seulement de ma faute ? Si je m’éloigne, elle ne sera plus jamais en danger ? Elle n’aura vraiment plus rien à craindre ? J’ai envie d’y croire ! De me dire que ce que je vis, n’est pas en vain… Mais il y a quelque chose que je ne comprends pas. Dieu qui n’est qu’amour… Pourquoi est-ce que je la mets en danger en l’aimant ? Pourquoi mon amour est-il dangereux ?

- Elle ne craint plus rien ? Comment en êtes-vous si sûre ? Je veux juste la protéger... et l'aimer... Je veux juste... Qu'elle aille bien... Pourquoi ça ne marche pas ? Pourquoi elle est quand même en danger ? Alors que je l'aime...
- C'est la punition de Dieu... Une rétribution cruelle pour ceux qui l'ont défié. Cela peut sembler injuste mais il faut voir plus large. L'on est des anges, des créatures divines. L'on n’est pas des hommes. L'on doit aimer toute la création, pas chercher une favorite. Cela prendra du temps, mais je t'aiderai. Je t'aiderai à dépasser ton ancienne vie et à embrasser ta nouvelle...

Mes mains s’agrippent encore plus au haut de l’ange, et je la regarde, complètement déboussolée et perdue. Je ne comprends pas… Je ne comprends rien. Kaylee est seule… Je me suis dit que je n’enfreignais aucune règle, puisque celle que j’aime n’est destinée à personne ! Pourquoi est-ce un problème ? Je ne fais de mal à personne d’autre ! Je ne la vole pas !

- Mais je ne comprends pas... Elle n'a personne ! Pas de ruban... rien ! L'aimer ne m'empêche pas d'aimer les autres ! Et elle m'aime aussi ! Pourquoi c'est un problème ? Je ne l'oblige à rien... je ne l'ai jamais obligée...
- Ce n'était qu'un jeu, c'est ça ? Cela ne te rend pas moins responsable... Tu dis qu'elle a personne, mais n'as-tu jamais considéré que c'était son destin ? Dieu a un plan pour tous, même si les démons essayent de les détruire. N'as-tu pas pensé qu'en la faisant prendre le mauvais chemin, tu n'as pas causé le début de ses malheurs ? N'a-t-elle pas décidée de se mettre sur le chemin de la destruction à cause de toi ? A cause d'un simple gribouillis dans un carnet ? N'aurait-elle pas juste posé le carnet sur le lit de ce jeune homme sans plus y penser et continué sa tranquille vie si elle ne connaissait pas ton nom ? N'aurait-elle pas évité tous les malheurs, ces affaires dangereuses et risquées, ces blessures ? Ne l'as-tu pas tiré dans tes bras ? N'as-tu pas essayé de faire durer ton baiser ?

Son destin serait d’être seule ? Kaylee ? Je n’arrive pas à le croire. C’est impensable. Pas elle ! Je ne peux pas l’imaginer seule et d’une autre manière, je suis rassurée… Mais je retire rapidement cette pensée de mon esprit. C’est mal… C’est mal d’être heureuse que personne ne l’aura… De penser que si je ne peux pas l’avoir, c’est bien que personne d’autre non plus. Je veux qu’elle soit heureuse. Mais je veux être celle qui la rend heureuse…
Je me fige encore et les yeux écarquillés, je me rends compte à quel point je suis… mauvaise. À quel point je suis égoïste…et détestable… Elle a raison… c’est de ma faute si elle se met en danger… Si elle ne connaissait pas mon nom, elle ne se serait pas prise cette balle dans l’épaule… Je suis tellement égoïste… que j’ai ignoré le fait qu’elle ne voulait pas m’embrasser pendant la soirée et j’ai même eu le culot de ne pas regretter mes actions… J’ai pensé que c’était bien… J’ai pensé que j’avais le droit parce que je suis amoureuse… et que je voulais qu’elle m’aime en retour… Me rendant compte de mes erreurs, je baisse les yeux, m’éloignant un peu de l’ange, perturbée par ses mots, le cœur brisé en mille morceaux.

- Alors... vraiment tout est de ma faute... Je suis... responsable... Je suis vraiment égoïste en fait... Je pensais que je la rendais heureuse... Je pensais que j'étais tombée amoureuse pour une raison... J'avais tort ? Pourquoi je suis tombée amoureuse alors ? Pourquoi Dieu m'a-t-il laisser faire ? Je ne comprends pas...

J’avais tort… Depuis le début… Je me suis véritablement imposée à elle. Je lui ai imposé mes sentiments, je me suis moquée des avertissements… J’étais encore humaine. Je n’ai donc jamais accepté ma nouvelle race… ?

- Dieu ne t'a pas infligé de mal... La faute est celle des démons qui résident dans les humains et tentent de nous faire dériver de nos chemins. Tu n'étais pas assez forte. Tu n'étais pas aidée alors que tu étais à ton plus faible. Je ne laisserai pas cela t'arriver encore une fois. Tu deviendras plus forte, plus jamais tu auras aussi mal.

La faute des démons ? Alors ce n’est pas entièrement de ma faute ? J’ai juste été faible…encore. Et cette fois, on m’aiderait ? Ses mots m’apaisent, me calment et me bercent. Mes doits s’agrippent de nouveau au vêtement et je tourne la tête vers elle. Il faut que je m’éloigne d’elle… Mais… Elle m’aime. Elle me l’a dit… Elle me l’a répété ! Je ne peux pas l’ignorer ! Je serais encore plus méchante ! La forcer à m’aimer, puis la rejeter ! Je ne peux pas faire ça !

- Et Kaylee ? Et ses sentiments ? Je ne peux pas l'abandonner... Je veux devenir forte... mais...
- En du temps, elle reviendra sur son chemin. Mais tu vas devoir t'éloigner un moment. Je crains qu'elle ne puisse sinon se perdre à jamais dans les ténèbres. Si tu crains tant pour elle, je me chargerais personnellement que rien ne lui arrive.

M’éloigner d’elle… Je sais que c’est ce que je dois faire… Mais chaque fois que j’y pense… mon cœur se brise… non… pas seulement mon cœur, une part de moi. M’imaginer sans elle… Je me sens vide. Je me sens seule… Incomplète… Insuffisante… Insignifiante. Est-ce que ça changera ? Est-ce que je guérirais ? Est-ce que je tournerais la page ? Ça me semble impossible…

- M'éloigner... Je suis déjà loin d'elle et mon cœur me fait souffrir...

Une petite chaleur capte mon attention et je lâche l’ange, me détournant d’elle, attirer par cette chaleur contre ma poitrine. Cette chaleur qui m’apaise, et semble m’accepter telle que je suis. Je baisse les yeux sur le collier… ce cœur, preuve de l’amour que me porte Kaylee, preuve de notre lien… de notre promesse… Elle ne m’abandonnera plus… et se battra avec moi pour notre couple… Je suis perdue… tiraillée entre ma raison et mon cœur… Il faut que je la protège… mais je ne veux pas la trahir…

- Je ne veux pas souffrir... et être loin d'elle me fait souffrir... J'ai... l'impression que je suis liée à elle... C'est étrange... Même humaine, je n'ai jamais ressenti ça pour personne.

Pourquoi est-ce un sentiment si fort, si pur, si c’est mal ? Il a suffi qu’elle sourit pour que je me retrouve à ses pieds… Elle dit que ce sont les démons qui ont pénétré mon cœur… Mais comment un sentiment aussi fort, et simple, peut-il être démoniaque ? Je ne comprends pas… J’avais l’impression de lui être destinée… Que ma simple raison d’être était d’être auprès d’elle… de l’adorer, de la soutenir, la protéger… Ça me semblait si naturel… Et pourtant, son attitude m’a d’abord dégoutée, je la trouvais hautaine…irrespectueuse… Je la détestais… et finalement, c’est à ses côtés que je me suis trouvée… Si je m’éloigne, est-ce que je ne vais pas me perdre à nouveau ?
Le fil de mes pensées est stoppé par un doux baiser qui se pose sur mon front, l’ange prend ma main et je tourne la tête vers elle.

- Tu dois retirer le couteau de la plaie si tu veux qu'elle guérisse. Maintenant, il est temps de sortir du purgatoire et de retourner au soleil.

Retourner au soleil ? Je pourrais partir ? Mon regard s’éclaire alors qu’un sourire se dessine sur mon visage. Je vais sortir !! Je serais libre ! Je pourrais la retrouver !

- Prends ce collier et retire-le. Je suis là avec toi, je sais que ça va être difficile. Mais crois-moi, tu te sentiras mieux.

Je me fige à ses mots. Mes yeux se posent sur le cœur dans ma main. Le…le retirer ? Je sens mon cœur se briser dans ma poitrine. Je ne peux pas… Je ne peux pas… Je ne peux pas juste m’éloigner d’elle ? Simplement m’éloigner ? Et continuer à l’aimer de loin ? Comme je l’avais fait au début ? Je ne veux pas qu’on me retire ce cœur… Je veux le garder… Je veux me souvenir… Je veux…
Mes pleurs reprennent, silencieusement… Partagée entre Kaylee... et les anges… Il faut que je choisisse les anges ? Je dois choisir les anges et abandonner Kaylee pour sortir d’ici ? Ils me demandent d’abandonner mes sentiments pour elle ? Je ne peux pas faire ça. Je ne peux tout simplement pas. Ce cœur… c’est à présent le mien… Je me suis battue pour le récupérer. Me l’arracher, revient à me tuer.

- Je ne peux pas. Ce cœur est le mien. Il est ma vie. Mais je vous promets de m’éloigner ! Je ne l’approcherai plus ! Si je m’éloigne, ses sentiments vont changer, j’en suis sûre !! S’il vous plait ! Croyez-moi ! Je resterai loin ! Je serai un bon ange !

Implorant son indulgence, je m’accroche au col de sa veste, les joues encore humides de mes larmes. Je veux sortir d’ici ! On doit sûrement pouvoir trouver un arrangement !

Son regard qui me traverse, montrant son mécontentement, me fige instantanément. Elle m’éloigne d’elle et je me sens seule… Je ne me suis jamais sentie aussi seule… si peu soutenue… Elle ne m’accepte pas… Elle veut me changer… Elle refuse que je garde mon cœur, que je garde ce qui fait ce que je suis. Je me sens si seule, si brisée de l’intérieur. Il faut que je sois quelqu’un d’autre pour qu’elle m’accepte ? Pour qu’elle me pardonne ?

- C'est tout ou rien, petite Lova. Les demi-mesures veulent dire que tu ne prends pas de décision et au final, tu te feras plus de tort à toi et aux autres. Si tu gardes ce collier, tu seras tentée, tu iras la retrouver, et qui sait ce qui lui arrivera cette fois ? Non, je ne peux pas te laisser faire. Tout... Ou Rien. L'Enfer et la damnation, ou le paradis et le salut.

Tout…ou Rien ? Je reste figée, les bras le long de mon corps nu, mon regard perdant petit à petit sa brillance, à mesure que l’espoir s’échappe. Je n’ai pas le choix… Les larmes reprennent de plus belle. C’est injuste… Ce n’est pas juste… J’ai promis ! J’essaye de la satisfaire tout en faisant en sorte que ce soit simple pour moi ! Pour garantir que je respecterai ses ordres ! Il n’y a pas de mal !

- J'essaye juste... De vous faire plaisir... sans me faire du mal... Je ne vais pas l'approcher ! Je suis dangereuse pour elle ! Jamais je ne l'approcherai !

Je l’implore, la supplie de me croire, mais la seule chose que j’ai en retour, c’est une nouvelle gifle qui me fait hoqueter alors que le jardin disparait pour laisser place à l’obscurité et au désespoir. Non… Non… Pas ça… Pas cette pièce. J’ai l’impression de suffoquer. Qu’est-ce que j’ai fait ? Qu’est-ce que j’ai dit ? Je retire ce que j’ai dit !! S’il vous plait ! Un sentiment s’empare de mon cœur et de mon corps, et soudainement, ma respiration se fait laborieuse. Je n’arrive pas à reprendre mon souffle, mon cœur me fait mal. Je reste au sol alors que mon bourreau me crache son mécontentement.

- Pour mon plaisir ? Tu n'as donc rien compris, rien appris. Tu es encore plus sotte et emplie de péché que je le pensais. J'ai fait l’erreur de croire que tu pouvais réaliser ce que tu avais commis aussi vite. Non...

A-aidez-moi…

- S’il vous plait…
- Je suis... déçue... Lova.
- Non… Pitié…
- Je croyais que tu pouvais comprendre la nature de ta faute. Mais j'ai eu tort...
- N-non…
- Tort de croire que tu pouvais encore être digne d'être pardonnée. Tu vas apporter la mort sur ton passage, j'espère que tu en seras fière face à la tombe de ta favorite.

H-Hein ? Je me redresse, écarquillant les yeux. Qu’est-ce qu’elle veut dire ? Je ne comprends pas ! Elle a dit qu’elle la protègerait ! Pourquoi elle parle de sa tombe ?! Pourquoi ?! La panique prend encore plus possession de mon cœur, s’ajoutant à mon corps entier et je me mets à trembler. Le tremblement, ainsi que ma voix, est incontrôlable et je hurle, entendant ses pas s’éloigner. Non ! Ne pars pas !

- Qu'est-ce que vous allez lui faire ?! Vous n'avez pas le droit !!!

Où est-elle ? Il faut que je l’empêche de partir ! Il faut que je la rattrape ! Mais je ne vois rien ! Le noir est omniprésent ! Et rapidement, je finis par abandonner… Je n’ai plus la force… La goutte est revenue…et m’affaiblit psychologiquement… La seule chose que je peux faire, c’est me recroqueviller sur moi-même, et prier pour qu’elle aille bien.

- Kaylee… Kaylee… S’il vous plait….

J’entends les pas s’arrêter et je me fige, attendant.

- Oh, je ne lui ferais rien. Tu vas t'en charger pour moi.

J’écarquille à nouveau les yeux, sous le choc, alors que les pas reprennent pour finalement me laisser seule avec le noir et l’humidité. Je…Je vais m’en charger ? Comment ça ? N-non. Non je ne peux pas… Qu’est-ce qu’elle a en tête ? Qu’est-ce qu’elle prévoit ? Les tremblements reprennent de plus belle, et je me roule en boule contre le sol râpeux et froid, attendant mon sort… Ça fait combien de temps que je suis là ? Plusieurs heures ? Jours ? J’ai faim… J’ai froid… Sa chaleur me manque… Je vais mourir ici ?

Les minutes… ou les secondes, je ne sais plus, passent… Et la douce chaleur contre ma poitrine reprend, illuminant mon visage. J’ouvre les yeux, pour revoir le cœur briller d’une lueur oranger apaisante. C’est une lumière familière, qui me rappelle son visage… et son odeur de soleil. Je veux l’avoir contre moi… Kaylee… Où es-tu ? Qu’est-ce que tu fais ? Est-ce que tu me cherches ? Est-ce que tu es en danger ? J’espère qu’elle n’est pas seule…
Soudainement, le médaillon s’illumine plus fort et je me redresse, surprise.

- Qu’est-ce qu’il se passe ?

Je l’observe intensément, fascinée par la lumière, espérant une réponse. Dis-moi quelque chose… Que signifie ta lumière ? Est-ce que tu me rassures ? Me donne espoir ? Pourquoi ? Tu veux me dire qu’elle n’est pas loin ? Que je dois tenir ? Je ne comprends pas… Je veux qu’elle vienne me chercher et… en même temps… il ne faut pas… Elle va encore se mettre en danger pour moi… Elle va encore risquer sa vie… Il ne faut pas qu’elle vienne. Il faut que je la protège… Il n’y a que moi qui peut faire quelque chose pour que les anges la laissent tranquille.
Le cœur battant à tout rompre, mes mains cherchent le fermoir du collier… Je suis la chaîne des doigts, mais je ne sens rien. Pas de fermoir… Pas de moyen de l’enlever… J’écarquille les yeux…

Alors qu’un sourire se dessine petit à petit sur mon visage, et progressivement, je sens le fou rire prendre possession de mon corps. Riant, je me tords, prenant mon ventre dans mes bras.

- Hahahahaha !!! Vous pouvez toujours me demander de retirer ce collier !!! Je ne peux pas !! Qui a enchaîné qui dans cette histoire ?! Vous êtes complètement stupides !! STUPIDES !! STUPIDES STUPIDES STUPIDES !!!! HAHAHAHAAAAA !!! Alors c’est moi, qui est pleine de péchés ?! PEUT-ÊTRE ! MAIS ELLE AUSSI !!!

Je n’arrive pas à m’arrêter de rire. Ça fait du bien ! Je me fous de l’écho ! Je me fous de la goutte ! Je suis devenue folle ! Je sens la folie prendre possession de mon esprit. Je ris, encore et encore. Je ne me contrôle plus. Il fait noir, il fait froid, c’est humide. Mais je me redresse, et je danse dans la nuit, guidée par la lumière. Cette lumière qui m’enchaine à l’espoir, et à elle. Je continue de danser, nue, et une chanson que je connais me vient en tête. Je commence à fredonner et, dans ma bulle, je me mets à chanter, utilisant la goutte comme tempo.